Véronique RIZZO 

Texte de Lili Reynaud-Dewar - 2006
in Monographie - Véronique Rizzo, édition 02, Paris

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« J'ai déjà dit qu'il était raisonnable de parler de la primitivité d'une situation en tant qu'opposition à ce qui est là. Cette primitivité est ce qui s'appelle le domaine de l'âme plutôt que celui de l'esprit. »
Richard Wright, Hello B No Clothes I Love You, 1996.

« Le genou dit à la géométrie : - Se mettre à genou, c'est la découverte de l'angle droit. La tête en train de réfléchir : - La géométrie naît du réflexe du corps qui se projette dans mon esprit. »
Lygia Clark, Lettre à Hélio Oiticica, Paris, 6 juillet 1974



On pourrait réduire et organiser les utopies esthétiques du siècle dernier en deux grands pans d'avant-gardes successives : l'utopie moderniste, l'utopie psychédélique. Elles partagent notamment l'objectif de réformer l'espace social et individuel par l'art et de proposer une conception radicalement nouvelle du monde, débarrassée de ses scories figuratives et de ses à priori représentationnels : l'abstraction comme le vecteur d'une harmonie nouvellement possible entre l'homme et le monde.
« Pour la Nouvelle Plastique, la nature est cette grande manifestation au travers de laquelle notre moi le plus profond est révélé et assume son apparence concrète. (…) Plus nous percevons l'harmonie de manière pure, plus nous pourrons exprimer plastiquement de manière pure la relation de la couleur et du son. »
« Le psychédélisme équivaut à une conscience de l'esprit grand ouvert. Psychédélique signifie extatique, ce qui veut dire se tenir en dehors des repères normaux. Cela signifie sortir de votre esprit, de votre monde habituel de contingences, espace et temps coordonnés. Et le point primordial : tout ce qui existe en dehors existe ici à l'intérieur. »
Equivalence globale du projet : retrouver une conscience 'pure' du monde, développer les moyens concrets de l'exprimer.
« La recherche de l'expression de la vastitude a entraîné la recherche de la plus grande tension possible : la ligne droite ; parce que toutes les lignes courbes se résolvent dans une droite, il ne reste plus de place à la courbe. »
« L'art psychédélique est généralement cinétique, vibrant, et animé par un mouvement d'incessante ébullition. »
L'importance des drogues dans l'expérience psychédélique n'explique qu'en partie la rupture caractéristique avec l'esthétique construite du modernisme. C'est également à un certain héritage moderne que s'attaquèrent les beatniks puis les hippies. Porteurs d'une utopie collective rejetant en bloc l'individualisme de la société bureaucratico-familiale des années 50/60 (de la même manière que le modernisme proposait un modèle collectif nouveau, en rupture avec le conservatisme de la société libérale bourgeoise du début du XXème siècle), ce qu'ils ont dénigré le plus frontalement était le rationalisme intégré et oppressant, hérité entre autres d'une certaine conception/déviance du modernisme. Enfin, pris dans son ensemble, du moins à partir des années 60, le mouvement psychédélique est anti-élitiste, de masse, et intègre à son projet esthétique tout un tas de motifs issus de la culture populaire, de la rue, de la musique pop, du folklore fashion, des croyances philosophico mystiques, des drogues hallucinogènes, de références à une culture visuelle éclatée (des tendances ornementales de l'Art Nouveau aux imprimés sériels orientaux), etc… Un double mouvement de dilution dans le mainstream et de diffusion vers le mainstream qui pose les conditions de la post-modernité et d'une autonomie réévaluée de la création. Face à la pureté - du moins revendiquée- du projet moderniste, le mouvement psychédélique est une idéologie esthétique et critique corrompue par son rapport massivement libéré à la culture populaire ; c'est un bâtard…

Alors qu'émerge aux Etats-Unis la pensée psychédélique, une scission s'opère au sein des artistes concrets, en Argentine et au Brésil, sous l'influence d'Hélio Oiticica et de Lygia Clark, et plus tard en France, au travers des expérimentations plastico-sociales du Groupe de Recherches d'Art Visuel.
A Sao Paulo et à Rio, l'esthétique rationaliste de l'art concret regroupe deux tendances : la tendance 'paulista', plus intellectuelle, et la tendance 'carioca', plus intuitive, à laquelle appartient Lygia Clark. « Moi, si je travaille, Mondrian, c'est pour me réaliser, au plus haut sens esthétique et religieux. Ce n'est pas pour faire des surfaces. Si j'expose, c'est pour transmettre à d'autres ce moment d'arrêt dans la dynamique cosmologique que l'artiste peut capter ». Sans rejeter en bloc la pensée de Mondrian, Lygia Clark et quelques 'néo-concrets' souhaitent lui donner une épaisseur cosmique qu'on pourrait considérer aux antipodes du projet rationnel de De Stijl (n'étaient ce les ambiguïtés associées à la quête d'absolue vérité du gourou du néo-plasticisme). Pour Lygia Clark, l'abstraction ouvre deux voies : « Lorsque l'artiste a aboli la figure et qu'il est entré dans l'abstraction, il y eut comme toujours, deux positions, l'une romantique, l'autre construite. Deux tendances différentes mais valables, car nécessaires à l'expression. » C'est l'alternative romantique que semble privilégier alors Lygia Clark, qui définit son rapport au monde comme « panthéiste ». Alternative qui fait écho à la bourgeonnante conception psychédélique de la création : traversée par le désir d'immersion dans le sublime et de communication avec l'univers, par le mythe d'une origine perdue et de la rupture (sociale, intellectuelle) indispensable pour fusionner à nouveau avec elle.
Dans cette quête de l'expérience absolue, il faut voir le préliminaire à une réévaluation du réel, à une volonté de transformation effective des rapports sociaux. Il n'y a pas contre-culture qui ne veuille agir « en tant qu'opposition à ce qui est là ».
Lygia Clark fera évoluer son art vers une renonciation de sa condition d'auteur, pour proposer uniquement « des situations dans lesquelles l'autre traverse des expériences, peut-être même pas esthétiques, mais plutôt sensorielles et psychologiques. »
Paris post 68, le GRAV pose les principes d'une abstraction perceptuelle et de l'effectivité de nouveaux modèles relationnels entre oeuvre et spectateurs. « En même temps que l'art à évolué du figuratif vers le réel, de la fiction vers l'événement, il s'est dépouillé de son lourd fardeau métaphysique. A partir de maintenant, il fait partie de la vraie vie (…) Il est, par-dessus tout, un facteur d'activation de nos sens. Je fais un art de sensations primaires. » Exit la dimension métaphysico cosmique de l'art, le sublime : le GRAV s'appuie uniquement sur les effets transmissibles au nerf optique par les moyens cinétiques. Des effets psychotropes sans la consommation de psychotropes… Peut-être est-ce de là qu'il faudrait partir pour tirer les conclusions de la brièveté du moment du GRAV. « L'Op Art, plus que n'importe quel autre mouvement artistique, semble finalement avoir obéi à la lettre à son principe d'obsolescence planifiée. » Sans doute faudrait-il aussi prendre en compte son intégration ultime à l'intérieur même des structures de l'establishment libéral et de la planification sociale, manière d'accomplir intégralement (d'achever) le projet de fusion (!) avec la réalité (quoique sans l'ampleur requise pour la pérennisation de l'alliance). Ailleurs, dans les années 70, Lygia Clark propose des situations et des objets transactionnels thérapeutiques…

En 2005, Véronique Rizzo s'approprie la juxtaposition et l'imbrication de plans colorés des Surfaces Modulées (1955) peintes par Clark durant sa période néo-concrète. Opérant une sorte de raccourci analytique du parcours de l'artiste, la reprise fonctionne littéralement comme mise à plat de la structure compositionnelle originale : un agencement de praticables, petits tapis de mousse recouverts de skaï ? de couleurs vives. Cette synthèse entre les débuts géométriques abstraits de Lygia Clark et ses années de recherche expérimentale autour du corps questionne bien sûr l'idée d'un usage à faire de l'abstraction, de son appropriation possible par le corps du spectateur. Mais c'est surtout le potentiel même de cet usage, à l'heure d'une normalisation relationnelle des oeuvres et d'une intégration normalisante des 'motifs' issus de l'abstraction par le design et la décoration intérieure, qui est l'objet d'une indécision revendiquée. Confortables et jolis, souples et pratiques, intégrés à l'espace (comme on pourrait le dire d'une cuisine en kit), les praticables de Véronique Rizzo demandent : Comment proposer maintenant une expérience relationnelle et corporelle radicale ? L'abstraction est-elle vraiment diluée dans un paysage adéquatement designé pour la souplesse de nos mouvements consuméristes ?
Posant ces questions devenues académiques, qui animent, de manière plus ou moins cynique ou nostalgique, le discours artistique actuel autour de l'héritage des avant-gardes, du modernisme et de l'abstraction, Véronique Rizzo y apporte un corpus de réponses et de stratégies marginales.
Clairement, si l'on devait reprendre la distinction opérée par Lygia Clark, les oeuvres de Véronique Rizzo se situeraient du côté d'une approche romantique de l'abstraction géométrique.
Mais cette approche romantico-intuitive, qui pourrait se réduire à un voeu pieu légèrement déphasé, voire dépassé, est contrebalancée et optimisée par un traitement ajusté de la culture populaire contemporaine. Les vidéos de Véronique Rizzo flirtent avec le V-Jaying et l'imagerie Acid House tout autant qu'avec les dispositifs optiques du GRAV et le Joshua White Light Show qui servit de fond multi-coloré aux groupes des années 60 . Elle utilise les logiciels 3D et de création d'images numériques à la manière d'une palette basique et 'inspirante', exploitant précisément leurs effets les plus connus et élémentaires, leurs tropes. Elle emprunte les titres de ses oeuvres à ceux d'albums de Soft Machine, à des mantras, ou encore à des injonctions de la contre-culture numérique, télescopage post-moderne qui signe l'inscription de son travail dans une culture contemporaine qu'on a appelée celle du pixel.

Plus qu'à l'utopie moderniste et à l'abstraction 'construite', c'est à l'utopie psychédélique et à l'abstraction perceptuelle que s'arriment ses oeuvres. Vibrantes, flashy, englobantes, les vidéos et les peintures murales de Véronique Rizzo développent une esthétique pléthorique de l'appeal visuel et de l'effet. C'est d'une dynamique exponentielle dont il s'agit chez elle, une méthode de pandore, qui produit non seulement l'effet perceptif du mouvement permanent, mais aussi l'effet dialectique du mouvement permanent. Aucune image ne prévaut sur une autre, aucun motif ne prévaut un autre, aucune priorité n'est organisée, pas de tri sélectif, pas de désignation référentielle, pas de hiérarchie. Ce faisant, elle affirme deux orientations à la fois contradictoires et combinatoires : celle, critique, d'une appréhension atmosphérique de l'abstraction, même plus décorative ni ornementale, seulement ambiante, et celle, idéaliste, d'une appréhension intuitive de l'abstraction, délestée de sa rigidité analytique, réinvestie d'un pouvoir de négociation avec la dimension physique du spectateur. Plus symboliquement, il s'agit à travers cette dé-hiérarchisation, de poser les bases d'une possible libération sensorielle, à la manière psychédélique, de reconduire un certain nombre de stratégies de désorientation induites, soit par la consommation de drogues, soit par le travail cinétique sur le nerf optique.
Or, l'articulation de ces deux appréhensions formule bien un constat paranoïaque à l'égard de la récupération des formes issues de l'abstraction par l'imagerie libérale, constat suivi de ses tentatives, non de réhabilitation de ces formes corrompues par la société post-industrielle, mais de leur ré-exploitation, au sens à la fois spatial et économique. Car si l'on sait bien aujourd'hui que les oeuvres les plus immatérielles n'échappent pas plus à leur merchandization que les 'objets d'art', il n'en demeure pas moins que l'espace intime et sensoriel demeure le lieu privilégié pour la construction d'un monde en retrait de l'oppression économique et des idéologies dominantes.

En 1992, en pleine période Baggy , le groupe écossais Primal Scream formule ce voeu, comme une injonction entendue en rêve, pour introduire son tube, Loaded : « What is it exactly that you want to do ? We want to be free. And we want to get loaded. And we want to have a good time. » Slogan psychédélique type, quoique pragmatiquement amputé de toute ambition révolutionnaire. Concocté par un groupe d'obédience orthodoxe indie pop, Loaded fusionne adéquatement la pop et les influences de la déferlante House sur la Grande-Bretagne de la fin des années 80, qu'on appela le Second Summer of Love. Le Second Summer of Love réitère les motifs du 'moment psychédélique' : la drogue, la musique, et leur expérience collective sur fond de contre-culture organisée (avec entre autres son célèbre son club, l'Hacienda de Manchester) : l'hédonisme comme arme contestataire.
Tout comme le mouvement hippie, le Second Summer Of Love fut stigmatisé comme un mouvement de repli communautaire des jeunes autour de valeurs moins constructives et réformatrices que destinées à occulter la réalité et s'en échapper… Vision évidemment conservatrice, destinée à dénigrer l'importance d'une contestation en marge des structures politiques organisées. Mais la différence fondamentale avec le mouvement hippie, c'est qu'alors que celui-ci en appelait à un retour à une sorte de lifestyle originel, à la 'primitivité' d'un paradis perdu relevant d'un mythe (particulièrement américain, rien d'étonnant donc à ce le mouvement hippie soit né sur le continent américain), le Second Summer Of Love, empruntant son nom au Summer of Love de 1967 à San Francisco, se rattachait idéologiquement à une ère idéale vieille peine trente ans… Un hédonisme post-moderne ?
C'est le cas du discours hédoniste à l'oeuvre chez Véronique Rizzo, entre le traitement d'une imagerie historique et l'immersion du spectateur dans des sphères parallèles d'un indéniable présent sensoriel.


1. Texte de l'artiste, décrivant de manière subjective les effets du LSD, dans My Head Is On Fire But My Heart Is Full Of Love, cat de l'exposition éponyme au Charlottenburg Exhibition Hall, Copenhague, ed. Modern Institute, 2002, p. 48, publié la première fois par Transmission Gallery, Glasgow, 1996. (ma traduction)

2. Lygia Clark-Hélio Oiticica : Cartas, 1964-1974, Editora UFRJ, Rio de Janeiro, 1996, reproduit dans cat. Lygia Clark RMN 1998, p.288.

3. Piet Mondrian, Dialogue on the New Plastic, publié dans deux numéros de la revue De Stijl, février et mars 1919, republié dans Art In Theory 1900-2000, Charles Harrisson & Paul Wood, 2nd edition, 2002, p. 286. (ma traduction)

4. Michael Hollingshead, The Man Who Turned On The World, London, Blond & Briggs, 1973. Cité par Andrew Wilson, dans Spontaneous Underground, An Introduction to London Psychedelic Scenes, 1965-1968, in Summer of Love, Psychedelic Art, Social Crisis and Counterculture in the 1960s, ed. Christoph Grunenberg and Jonathan Harris, Liverpool University Press and Tate Liverpool, 2005, p. 63. (ma traduction)

5. Piet Mondrian, op. cit. p. 78.

6. Barry N. Schwartz, Psychedelic Art, 1968, cité Matthieu Poirier dans Hyper-Optical and Kinetic Stimulation, Happenings and Films in France, in Summer of Love, op.cit. p. 282. (ma traduction)

7. Lygia Clark, Lettre à Mondrian, Mai 1959, reproduit dans cat. Lygia Clark, op.cit., p.114.

8. Lygia Clark, 1960, reproduit dans cat. Lygia Clark, op.cit., p.139.

9. « La nature m'a nourrie et équilibrée quasiment de manière panthéiste », Lettre à Mondrian, op. cit.

10. Richard Wright, op.cit.

11. Ferreira Gullar, La trajectoire de Lygia Clark, cat. Lygia Clark, op. cit., p. 67.

12. Carlos Cruz-Diez, cité par Matthieu Poirier, dans Summer Of Love, op. cit. p. 284. (ma traduction)

13. Vincent Pécoil, Op Stars, Art Monthly n° 270, october 2003, p. 9. (ma traduction)

14. A ce sujet, lire l'entretien entre Edwin Pouncey et Joshua White, in Summer of Love, op. cit. p. 164-178.

15. Baggy, adj : ample, large. La musique des Happy Mondays, des Stone Roses, etc, et occasionnellement de Primal Scream… est appelée ainsi à cause des larges et mous portés par ces groupes, inspirés par la mode des dance floor house.

16. « Qu'est ce vous faire au juste ? Nous voulons être libre. Et nous voulons nous défoncer. Et nous voulons prendre du bon temps. » Album Screamadelica, Creation Records, 1992

 
 
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English version

Text by Lili Reynaud-Dewar - 2006
in Monographie - Véronique Rizzo, édition 02, Paris
Translation Aude Launay, Enzo Thalizari



"I already said it was reasonable to speak of the primitiveness of the situation as an opposition to what is actually there.
This primitiveness is what is called the domain of the soul rather han the mind."'
RICHARD WRIGHT, Hello B No Clothes I Love You, 1996

"Knees tell geometry: to kneel is to discover the right angle. Head thinking: geometry comes from body's reflex being cast in my mind.`
LYGIA CLARK, Letter to Hello OIIILGA, Paass, July 6", 1974.


AESTHETIC
utopias from the last century could be reduced and organized into two successive waves: modernist utopias and psychedelic utopia. They especially share the aim to reform social and individual space by the art way and to get a completely new idea of the world, cleared of its figurative scories and representational preconceptions: abstraction as a new vehicle for new harmony between men and the world.

"For the New Plastic too, nature is that great manifestation through which our deepest being is revealed and assume his concrete appearence. (...) The more we feel harmony in a clear way, the more we could plastically express the relation there is between colour and sound in a clear way 3 ".
"Psychedelic equals mind-opening consciousness. Psychedelic mens ecstatic, which is to stand outside our normal patterns.It means going out of your mind, your habitual world of contingencies, space-time co-ordinates. And the key issue: Anything that exists outside exists there inside.4 "

Global equivalence in plans: to feel a pure awareness of the world again and develop practical means to express it.
"The search for a way to express hugeness led to the search for the greatest tension: straight line, because all curves solve themselves into a straight line, and
there is no space left for a curve 5".
"Psychedelic art is generally kinetic, vibrant and animated by an incessant bubbling 6".
Characteristic break with constructed modernist esthetic can only partly be explained by the importance of drugs in psychedelic experience. It was also a beatnik and hippie attack against some modern heritage. Bringing a collective utopia which turned down individualism inherent in bureaucratico-domestic society from the the fifties and sixties (just as modernism offering a new collective pattern, at odds with conservatism in liberal bourgeois society at the begining of twentieth century), what they most disparaged was oppressive integrated rationlism, legacy of some notion/deviance of modernism. Finally, psychedelic movement as a whole, at least from the sixties, is anti-elitist, mass movement, including in its sthetic project heaps of motives coming from pop culture, streets, pop music, fashions, mystic philosophical beliefs, hallucinogenic drugs, references to a scattered visual culture (from ornamental leanings in Art Nouveau to oriental serial prints), etc. Dilution in mainstream and spreading to mainstream in a sort of double movement stating terms of postmodernity and reassessed autonomy of creation. Faced with modernist project purity - as it's a staunch purity -, psychedelic movement appears as a critical and sthetical ideology distorted because of its absolutely liberated relations to popular culture; it's an hybrid.

WHILE psychedelic thinking was coming to light, concrete artists split off;
Helio Oiticia and Lygia Clark influenced it in Argentina and Brasil,
and Rio, and later, social plastic expérimentations from the Groupe de Recherches d'Art Visuel let to the same in France.
Rationalist aesthetics of concrete art is made of two drifts n Sào Paulo and Rio, intellectual "paulista" drift, and intuitive "carioca" one, which Lygia Clark is part of. 'You know, if I'm working, Mondrian, its to fulfil myself, in the higher aesthetic and religious sense. That is not to make surfaces. I make exhibitions to pass on this stopping moment in cosmological dynamics that the artist can capture 7".
Lygia Clark and some of these "neo-concrete" artists don't turn down the whole thinking of Mondrian; they wish they would give it a cosmic depth, what would be light years away from De Stilj rational project (forgetting ambiguities inherent in neo-plasticism guru quest for absolute truth). lo Lygia Clark, abstraction makes two different ways: "When the artist cut out L a figure and entered abstraction, two stances emerged, as ever, a romantic one and t a constructed one. Different ways but both are valid because altogether necessary t to expression 8 ". It seems that Lygia Clark favours romantic alternative, defining her connection with the world as "pantheistic 9" This alternative echoes psychedelic idea of creation, which is passed through by the desire to be deep into the sublime and to communicate with the universe, by the myth of a bygone origin and (intellectual, social) break, required to merge again into it.
This quest for absolute experience must be seen as the preliminaries to a reassessment of reality, to a wish of effective change in social relationship.There is no counterculture which would not act "as opposition to what is actually there10 ". Lygia Clark developped her art in a way of waving of her authorship condition, and only set "situations in which the other goes across experiences, t maybe more psychological or sensory than cesthetical.11"
After 1968 in Paris, the GRAV lays down the principles for a percept tuai abstraction and for effectiveness of new relational models between work and viewers "At the same time as art has moved from the figurative to the I real,from fiction to the event, it has shed its bis rdenstone metaphysical mantle. From now on it is part of real life(...) It is, above all, an activating factor of our senses. t I am making an art form of primary sensations 12". Out goes cosmic metaphysical feature of art, the sublime: the GRAV is only based on the effects transmittable to the optic nerve by kinetic means. Psychotropic effects t without using psychotropic drugs Maybe would it tell us why GRAV time was so brief. "Op Art, more than any other artistic movement,finally seems to have obeyed to the letter this principle of planned obsolescence."
No doubt we also might take its final integration into the liberal dominant group and in social planning into account, a way of fulfilling the plan t to merge with reality (though it would not be so important to perpetuate t the union). Elsewhere in the seventies, Lygia Clark introduces therapeutic transactional objects and situations.


IN 2005, Véronique Rizzo appropriates juxtaposition and overlapping of coloured surfaces from Surfaces Modulées (1955) painted by Lygia Clark in her neo-concrete period.

Carrying out a kind of analytic shortcut in the career of the artist, the revival litteraly operates as the original composition structure was unpicked: laid out bright coloured mats made of Leatherette. This synthesis between abstract geometrical first steps of Lygia Clark and her experimental research years on the body topic obviously asks questions about the use which can be done with abstraction, the possible appropriation by the spectator's body. But above all, it is the very potential of this use, at a time when works are relationnaly standardized and when abstraction motives are integrated by design and interior decorating, which is claimed to be undecided. Snug and lovely, soft and handy, fitting into the espace (just as it could be said of a fitted kitchen), Véronique Rizzo's mats ask how to offer some radical physical and relational experience now. Does abstraction truly become attenuated in a suitably designed scene for our consumerist movements to stay flexible?

Asking these questions now academic that prompt in a more or less cynical or nostalgic way, the current artistic discourse about abstraction, modernism and avant-garde legacy, Véronique Rizzo brings the original strategies and answers.

Clearly, if we had to take the distinction drawn by Lygia Clark up again, the works of Véronique Rizzo would rather stand on the romantic side of geometrical abstraction. But this romantic-intuitive approach that could be seen just as a disorientated or even outdated vain wish is compensated and optimized by an adapted treatment of contemporary popular culture. Videos by Véronique Rizzo flirt with V-jaying and Acid House imagery as much as with GRAV optical sets and the Joshua White Light Show that was used as a multicoloured background by sixties bands". She uses 3D and digital images making softwares as a basic palette to inspire herself, and precisely exploit their famous elementary effects, their tropes. Borrowing the titles of her works to Soft Machine LPs, to mantras or digital counterculture slogans, she includes her work within the framework of this contemporary culture pixel-named, in a postmodern intermingling.

M O R E than to modernist utopia or constructed abstraction, her works
fasten onto perceptual abstraction. Vibrant, flashy, engulfing, the videos and wallpaintings by Véronique Rizzo develop an excessive aesthetic of visual effect and appeal. It is an exponential dynamic we are faced with, a Pandora method, that not only produces the perceptive effect of perpetual motion. No image prevails over another, nor no motive, there is no organized priority, no selection, no referential designation, no hierarchy. Doing such things, she asserts two both contradictory and combinatory directions: one, critical, going for an atmospheris apprehension of abstraction, not even decorative nor ornamental, but only ambient, and another, idealistic, going for an intuitive apprehension of abstraction, relieved from its analytic inflexibility, reinvested by a negotiation power with physical feature of the spectator. In a more symbolic way, this unestablishment of a hierarchy is about to set down the possibility of a sense liberation, following up the psychedelic clue, and to renew many of the disorientation strategies induced by drug abuse or kinetic process on the optic nerve.
Well, the link between these two apprehensions leads to a paranoid review with regard to the takeover of forms from abstraction by liberal imagery, and this review involves not a rehabilitation attempt of these forms corrupted by post industrial society, but a re-exploitation attempt, in both spatial and economical senses. Because it is well-known today that even the most intangible works cannot escape merchandisation -neither cannot objets d'art-, private and sensory space is still the best place to build a new world set back from economical oppression and prevailing ideologies.

IN1992, as the Baggy period 15 was in full swing, scottish band Primal Scream wishes, introducing its hit Loaded: "What is it exactly that you want to do? We want to be free. And we want to get loaded. And we want to have a good time 16". Typical psychedelic slogan, although cut from the revolutionary ambition it could have retained. Cooked up by an indie-pop orthodox-run band, Loaded suitably merges pop with influences from House tidal wave in England in the end of the eighties called the Second Summer Of Love. The Second Summer Of Love repeats the motives of "psychedelic time": drugs, music, and their collective experience on an organized counterculture background ( let's remember the Hacienda, the famous Manchester club): hedonism for protest arm.

Just as the hippie movement, the Second Summer Of Love was branded as a turning in on community movement of the young towards values that appear less positive and reforming than used to cover up and escape from reality... This outlook is obviously conservative, designed to run down the signifiance of a fringe contestation. But the essential difference with the hippie movement is in the roots. While this one was appealing to a return to some original lifestyle, to the primitive qualities of a mythic paradise lost (this is really an american view, so it is no wonder that the hippie movement arose in the New World), the Second Summer Of Love, with this name borrowed from 1967's Summer Of Love in San Francisco, was ideologically connected to an ideal era that went back hardly thirty years... Postmodern hedonism? There is an hedonist discourse in Véronique Rizzo's work, between the treatment of an historical imagery and the immersion of the spectator in an undeniable sense present parallel spheres.


1. This text describes in a subjective way LSD effects, in My Head Is On Fire But My Heart Is Full Of Love, eponymous catalogue of the exhibition at Charlottenburg Exhibition Hall, Copenhague, ed. Modern institute, 2002, p.48 (first ed. by Transmission Gallery, Glasgow, 1996).

2. Lygia Clark- Hello Oiticica : Cartas, 1964-1974, ed. UFRJ, Rio de Janeiro, 1996, in Cat. Lygin Clark, RMN, 1998, p.288

3. Piet Mondrian, "Dialogue an the New Plastic", in Art in Theory 1900-2000, 2002, p.286 (first ed. in De Stilj review, feb- march 1919)

4. Michael Hollingshead, The Man Who Turned On The World, London, blond & Briggs, 1973. Quoted by Andrew Wilson in "Spontaneous Underground, An Introduction to London Psychedelic Scenes, 1965-1968", in Summer Of Love, Psychedelic Art, Social Crisis and Counterculture in the 1960's, ed. Christoph Grunenberg and Jonathan Harris, Liverpool University Press and Tate Liverpool, 2005, p.63.

5, Piet Mondrian, op.cit., p.78.

6. Barry N. Schwartz, Psychedelic Art, 1968, quoted by Mathieu Poirier in "Hyper-Optical and Kinetic Stimulation, Happenings and Films in France", in Summer of Love, op.cit., p.282.

7. Lygia Clark, A Letter to Mondrian, May 1959, in Catalogue Lygia Clark, op cit., p114, translated from French.

8. Lygia Clark, 1960, in Catalogue Lygia Clark, op,cit. , p.139.

9, Lygia Clark "Nature nourished and balanced me almost in a pantheistic way", Letter to Mondrian, op cit.

10. Richard Wright, op.cit.

11. Ferreira Gullar, "La Trajectoire de Lygia Clark", in Cat. Lygia Clark, op.cit., p.67

12. CarIos Cruz-Diez, quoted by Matthieu Poirier in Summer Of love , op cit., p.67

13. Vincent Pecoil, "Op Stars", Art Monthly n°270, October 2003, p.9.

14. Cf. the conversation between Edwin Pouncey and Joshua White in Summer Of Love, op.cit., pp.164-178.

15. The Baggy period refers to the music produced by the Happy Mondays, the Stone Roses, etc, and from time to time, by Primal Scream... This period is so called because ol the baggy pants worn by these bands, inspired by House dance floors fashion.

16. Primal Scream, Screamadelica LP, Creation records, 1992