Arnaud MAGUET 

Nourri des cultures alternatives et populaires des années 50 à nos jours, mais aussi des avant-gardes artistiques, Arnaud Maguet navigue entre plusieurs pratiques : scénique, éditoriales et plastiques. En premier lieu, il s'inspire de la musique, principalement du rock'n'roll et de ce qui en dérive plus ou moins lointainement, le garage, le krautrock, le punk, le psychédélique, le hip-hop, le free jazz, la musique répétitive. Mais il y a aussi les images, les films, souvent issus du cinéma underground ou de la série B.
En amateur, en bricoleur, parfois en producteur, Arnaud Maguet mixe ces influences pour composer une œuvre protéiforme : installations, bandes-sons, pochettes de disques, affiches de concert, vidéos ou photographies, etc.
Dans la continuité de ses recherches sur les formes du spectacle, l'artiste présente dans l'espace du Forum un dispositif composé de quatre espaces distincts.
33 révolutions par minute : ici et là sont disposées des pièces qui ont en commun le mécanisme de rotation. C'est donc d'abord au sens premier qu'il faut entendre ici le mot révolution. Mais pas seulement. Pour Arnaud Maguet, il est aussi question du bouleversement que provoqua le rock'n'roll, il y a maintenant plus d'un demi-siècle, et de ce qu'il est advenu de ce bouleversement : une "utopie fanée", qui tourne en rond sur elle-même, mais qui reste paradoxalement un objet d'amour et d'invention, d'énergie et d'expérimentations.
Chaque jour, à 19 heures, un ou plusieurs invités viennent jouer, lire ou performer dans l'espace.

Extrait du texte de présentation de l'exposition 33 révolutions par minutes (avec la participation d'Olivier Millagou), Forum, Centre Pompidou, Paris 2011

In My Room 2011
Bois, caméras de surveillance, vidéoprojection et performances, 400 x 500 x 500 cm (structure)
Courtesy galerie Sultana, Paris

Le premier espace est un cube fait de bois de coffrage, aveugle et sans toit. Sur un des murs sont posés des mots en fer forgé réalisés par l'artiste Olivier Millagou. In My Room : il s'agit du titre d'une des chansons des Beach Boys. Le titre, l'espace évoquent les vies adolescentes contemporaines : on sort de sa chambre sans en sortir, on reçoit le dehors via le web.
Par une porte dérobée, des artistes (musiciens, performeurs, auteur…) sont invités à entrer pour un rendez-vous quotidien. Devenus acteurs, nous pouvons parfois pénétrer un par un dans l'espace pour participer à un karaoké noise. Mais la plupart du temps, nous sommes tenus à l'écart, derrière les murs, et ne pouvons apercevoir l'événement que par les interstices, entre les planches disjointes, ou bien depuis la mezzanine. La hauteur des murs de bois interdit toute vision globale, surplombante.

In My Room 2011
Bois, caméras de surveillance, vidéoprojection et performances, 400 x 500 x 500 cm (structure)
Courtesy galerie Sultana, Paris

Sous le préau, la scène est retransmise par 4 caméras de surveillance dont les vues sont alternativement projetées sur un large écran. Cette alternance est rapide, mécanique. Équipée de canapés, la salle de diffusion propose, la majeure partie du temps, des plans sur des instruments en l'attente d'artistes, dans un espace vide. Mais dès que l'invité arrive, l'écran s'anime ; concerts, lectures et performances, filmés à la manière des hold-up, sont alors retransmis en direct.

L'Ambassadeur 2010
Papier de Ferrero Rocher marouflés sur bois, peinture et cadre, 200 x 100 x 5 cm

Le Phare 2011
Pied photo, platine vinyle, spot, câble et miroir, dimensions variables
Courtesy galerie Sultana, Paris

Également sous le préau, l'espace est inaccessible, plongé dans la pénombre. Au sol, un phare de fortune éclaire de son halo circulaire rotatif, trente-trois fois par minutes, un portrait d'Elvis Presley doré à la feuille de Ferrero Rocher. Cette image est inspirée d'une pochette d'album, le premier d'Elvis à avoir connu un grand succès. Mais ici le King n'est plus qu'une silhouette, sans main ni visage, nommé L'Ambassadeur. À savoir, pour Arnaud Maguet : celui par lequel une musique confidentielle se met à toucher un large public.

Fear of the Black Planet 2008
Sphère PVC, lumière noire, plexiglas, transistors, bois, moteur, lecteur CD et émetteur FM, 250 x 160 x 160 cm
Courtesy galerie Sultana, Paris
Vues de l'exposition 33 révolutions par minutes (avec la participation d'Olivier Millagou), Forum, Centre Pompidou, Paris 2011

Des transistors-satellites sont en orbite autour d'une sphère de lumière noire. Par-dessus des sons synthétiques planants, des noms d'activistes noirs américains sont scandés. Fear of the black planet est le titre d'un album du groupe de hip-hop américain Public Enemy sorti en 1990. Ironique, ce titre associe les noirs aux extraterrestres. Arnaud Maguet réfère ici au concept d'Afro-Futurisme. Mis en œuvre par plusieurs artistes et critiques dans la seconde moitié du 20e siècle, ce concept opposé à celui d'Afro-centrisme permet de faire le lien entre technologie et racines, musiques nouvelles et musiques traditionnelles. Politique, il favorise le rapprochement entre l'un des mythes chers à la science-fiction (le rapt d'humains par des aliens) et l'histoire du peuple africain (l'arrachement à la terre par les esclavagistes).
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