Monique DEREGIBUS 

Vues de l'exposition Hypothèse du regard, variations discontinues et greffes instables, Marseille, 2018-2019
Crédit photo Anne Loubet

Lire le dossier de presse
 

Vues de l'exposition Donner le moment tout entier, commissariat Isabelle Bourgeois et Jean Louis Connan, festival des arts éphémères, Maison Blanche, Marseille, 2016


Traversée

Si la voix se perd, c'est toute l'image qui s'évanouit…
Pour hommage à Chantal Akerman.

Impossible à la première visite dans ce lieu particulier "Maison Blanche" de ne pas ressentir la présence active de films qui précédèrent et qui ont marqué durablement l'Histoire du cinéma, comme " L'année dernière à Marienbad " d'Alain Resnais 1961, ou "India Song" de Marguerite Duras 1975.
Dans ces deux films, la beauté irradiante de Delphine Seyrig qui apparaît pour la première fois au cinéma dans le film de Resnais/ Robbe Grillet, m'est revenue en mémoire. Delphine Seyrig est le fil d'Ariane de cette installation particulière construite comme un palimpseste, aux évocations d'absences et de revenants.
Ainsi, la fameuse lettre de A. partie du château de Nymphenburg, Allemagne, où elle a été écrite en 1961 gagnera sa dernière destination chez Jeanne Dielman, 23 quai du commerce 1080 Bruxelles le lundi 5 octobre 2015 en soirée...

"Non cette fin là n'est pas la bonne, c'est vous vivante que je veux…"

Déambulation incessante et répétitive dans un dédale de couloirs qui ne renvoie qu'à la tristesse des miroirs, le visiteur est invité à partager cette curieuse cérémonie secrète faite de paroles, de musiques, de soupirs, de vêtements frôlés, pour, s’ il le désire, à son tour s' y attarder un moment. Survivances d'un passé mystérieux et sans clef, les personnages ici réduits à la bande sonore, tels des automates aveugles, semblent sans cesse rejouer une partition écrite à leur mesure… "…Pour toujours, dans un passé de marbre, comme ces statues, ce jardin taillé dans la pierre, cet hôtel lui-même, avec ses salles désormais désertes, ses domestiques immobiles, muets, morts depuis longtemps sans doute, qui montent encore la garde à l'angle des couloirs, le long des galeries, dans les salles désertes..."
Autoportrait de cinéma en quelque sorte.
Installer alors un décor transitoire en une tentative d'équivalence.
Fixité de l'image photographique,
papillons épinglés dans la vitrine,
ces personnages inquiétants et sans âge nous renvoient sans doute à une histoire de fantômes (de ceux que nous serons ou avons déjà été?) ainsi qu'à une perte définitive faite d'impuissance à accepter.
Enfin et surtout à la sollicitation, à l'abandon devant ce qui ne cesse et ne cessera pas d'advenir…

Monique Deregibus, avril 2016

 

 
Vues de l’exposition Le Pont, Musée d'Art Contemporain, Marseille, 2013
En compagnie de Mona Hatoum (Daybed, 2008)
Commissaire d’exposition Thierry Ollat
 

 
Vues de l'exposition Tout semble avoir été dit, Les Rencontres d'Arles, 2012
Installation photographique à quatre mains avec Arno Gisinger
Commissaire d’exposition Alain Leloup

Rencontres d’Arles 2012

L’exposition des travaux de Monique Deregibus et d’Arno Gisinger sur des cimaises reprenant la forme d’un huit éclaté permet de faire se rencontrer, se court-circuiter, se croiser les différents enjeux de la représentation. Les images de l’un entrent ainsi dans une relation dialectique avec les images de l’autre, jouant de leur complicité, parfois de leur disjonction. Ce désir particulier est né d’une confiance réciproque et d’un fonds de sensibilités communes adossé à la volonté affirmée d’en découdre avec la signature d’un seul.

C’est à partir d’un axe médian, d’un centre focal en quelque sorte, que s’effectue le rapprochement spatial entre deux géographies distante s: les regardeurs de la série 12 Betrachterbilder d’Arno Gisinger font face aux portraits d’enfants laotiens endormis de Monique Deregibus. Cette confrontation soulève la question conceptuelle du regard : qu’est ce que voir ? Regarder ? Qu’en est-il du leurre ontologique de la surface séduisante de l’image ? Et qu’est ce que le monde regardé par la photographie peut encore attendre de notre interprétation ?

Une réappropriation d’un moment d’une histoire lacunaire, restitué au présent de la rencontre avec l’image photographique peut alors advenir pour le visiteur et faire surgir du sens, de l’émotion, parfois une réminiscence.

Ce partage d’expériences sensibles d’un monde regardé par la guerre et la destruction constitue un vaste chantier à ciel ouvert qui déconstruit peu à peu la logique particulière de chacun. Cette exposition, à la fois grave et légère, interstice privilégié dans l’emballement généralisé du présent et de ses outrances, joue des rencontres fortuites et des multiplicités de lieux en présence, sans hiérarchie, suggérant au spectateur une arborescence de lectures possibles.

 

 
Vues de l'exposition Limites, commissariat Anne Giffon Selle, avec Benoit Laffiché et Till Roeskens, Centre d' Arts Plastiques, Saint-Fons, 2012

www.paris-art.com/limites

Lire un article à propos de l'exposition
 

 
Vues de l’exposition Paysage à grande vitesse, château de Suze-la-Rousse, 2005

L'exposition Paysage à grande vitesse, réalisée dans le cadre d'une résidence au château de Grignan au cours de l'automne 2004, est consacrée à la vallée du Rhône, de Valence à Orange, zone où se concentrent, sur une bande étroite, la ligne TGV, l'autoroute, la voie fluviale, un environnement qui est lié à l'idée de passage, au mouvement incessant. Cela en opposition à ce qui demeure, et comprend aussi barrages et centrales nucléaires. À cette opposition il faut ajouter celle qui s'établit avec ce qui subsiste de beaux villages, de nombreux vestiges historiques ou de sites relativement préservés qui créent un fort effet de contraste.
Monique Deregibus ne se propose pas de l'atténuer mais au contraire de montrer ce qui lui apparaît comme une violence à travers un montage contradictoire, haut en couleur, apte à rendre compte de cette singulière confusion.
Ces fragments de paysage silencieux sont installés à l'intérieur du château de Suze-la-Rousse, non sans humour, comme pour révéler cette manière d'anachronisme et de heurt des temporalités qui est le lot commun et la forme désormais généralisée de notre être au monde.
 
 
Retour