Anna BYSKOV 

Le trou 2017
Tarlatane, ciment, grillage, tasseaux de bois, mine de plomb
2 x 1,5 x 1,5 m

Masques 2017
Terre, paillettes
60 x 40 cm
 
 

Vues de l’exposition BADAAASS, Galerie La Mauvaise Réputation, Bordeaux, 2017
Avec Jeanne Moynot, Thomas Teurlai, Jean-Baptiste Le Chaplain
Une proposition d’Arnaud Labelle-Rojoux

Il y aurait assurément cent autres façons de justifier la présence des quatre artistes réunis dans l’exposition BADAAAASSS, mais aucune ne dit mieux que ce titre ce qui a guidé mon choix de les présenter ensemble. Car il ne s’agit pas d’un quatuor de mauvais goût (encore que !) – ce que pourrait laisser penser une traduction fautive de l’expression américaine badass (selon laquelle le « cul » malsain dominerait : porno, sado, scato) -, mais de quatre personnalités fortes ayant l’impertinence chevillée au corps de résister aux conformismes ambiants, ceux de l’art compris. Car le mot badass, qualifie en réalité des personnes qui ne s’en laissent pas compter, non impressionnables, suivant leur tempérament rebelle aux injonctions normatives, pas forcément ramenardes mais imposant leur style, leur façon
d’être et de vivre, leur expression. Cette chevalerie insolente, libertaire, appelle plus la légende que la reconnaissance. Mais nous n’en sommes pas là : nos quatre protagonistes sont jeunes (entre 25 et 35 ans), très actifs, et, « badasses » dans l’âme, s’inscrivent dans le présent. Plusieurs d’entre eux cependant, quoique sourds aux sornettes du « marché », bénéficient déjà d’une « visibilité » notable sur ce que l’on appelle la « scène artistique », ce dont je me réjouis particulièrement. Car leur point commun, par ailleurs, est d’avoir été tous les quatre étudiantes et étudiants, à cheval sur des périodes différentes, à l’école des beaux-arts de Nice, la Villa Arson, là où je fus professeur durant dix ans. Ils correspondent pour moi à des rencontres marquantes. S’ils ne dessinent pas ensemble une même vision de l’art, leur dissemblance constitue a contrario la mienne, faite de singularités libres, affirmées, nécessaires dans une société où les normes identitaires l’emportent. Au Jackass soft, faussement décervelé, d’Anna Byskov fait de foirades absurdes à la tonalité burlesque, s’oppose la sensation intense d’une beauté dangereuse, terroriste (je veux dire qui fait peur) de Thomas Teurlai, dont les réalisations techniquement exigeantes ne sont paradoxalement pas si éloignées formellement de celles bricoleuses de Baptiste Lechapelain « aimantées », comme le dit joliment Bernard Marcadé, par « les négligences de toutes sortes », cependant que Jeanne Moynot carnavalise grinçante le réel le plus trivial dans une ambiance de fête foraine punkisée. Nouvel art dégénéré ? Nulle part mieux que la galerie La Mauvaise Réputation, ne pouvait en accueillir l’énergie hérétique.
Arnaud Labelle-Rojoux

 
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