Brigitte BAUER 

D'Allemagne
Série de 68 photographies
Series of 68 photographs

D'Allemagne, c'est une enquête d'identité sous forme d'images. Des photographies qui relèvent à la fois de l'appartenance et de la distance. D'où je viens, d'où je suis partie.
Il y a en allemand ce mot "Heimat" qui n'a pas son équivalent dans d'autres langues, qui est habituellement traduit par pays natal, patrie, lieu de naissance. L'écrivain Bernhard Schlink donne à ce mot le sens de "Utopia", le sans-lieu, qui n'existe que dans la pensée, à partir d'un manque, à partir d'un désir. Entre les deux. C'est ce curieux mélange entre proximité et distance, entre passé et présent, entre vision idéalisée et réalité vécue qui me parait être le fil conducteur à travers les photographies D'Allemagne. Je vis désormais dans une autre culture et regarde mon premier pays avec des yeux étrangers quoique familiers.
Aujourd'hui, il y a toujours les mêmes villages et paysages, plus ou moins transformés, et à peu prés les mêmes gens, amis et famille, avec toute leur panoplie de relations, de l'intime à l'étranger en passant par l'indifférence. Tout cela, ce qui m'a structuré, ce que j'ai rejeté aussi, est devenu à nouveau mon présent, pour un temps. Comment traduire en images ces ambivalences de sentiments, cette sensation de me retrouver dans un entre-deux ? J'ai alors pris le parti de ne pas en avoir, et de me laisser guider par les apparences : les ciels souvent bas, la douceur des collines, les activités quotidiennes et banales des gens qui me sont suffisamment familiers pour accepter mon regard, voire oublier ma présence. L'ensemble des images révèle une vision aussi bien partielle que partiale de cette petite partie d'Allemagne qui formait le microcosme de mes vingt premières années.
A ces images du Sud se mêlent celles de l'Est - d'une partie de l'Est seulement, de ces lieux tant chargés d'histoire qu'ils en sont devenus lieux communs. J'avais envie de faire comme si je pouvais retrouver une identité allemande par la culture, en allant à Weimar, Dessau, l'île de Rügen si liée au peintre C. D. Friedrich tout en étant consciente du fait que ces lieux sont avant tout des lieux bien ancrés dans leur banale et dure réalité d'aujourd'hui.
Villages, paysages, gens, intérieurs, villes : ces séries à première vue hétéroclites en fait se complètent, forment un ensemble ou le tout est plus que la somme des éléments additionnés. Finalement, ce qui me relie à l'Allemagne, c'est aussi bien le vécu personnel que l'attachement culturel à ce pays. C'est peut-être le mélange d'appartenance et de distance qui rend ces images D'Allemagne un peu mélancoliques. Car où se trouve réellement mon Allemagne ? N'est-elle pas en fin de compte une fiction, une Heimat réinventée.
Brigitte Bauer, Janvier 2003

D'Allemagne, is a search for identity in the form of images. It is made up of photographs that speak both of belonging and distance: where I come from, the place I am a part of.
There is a German word, heimat, which has no equivalent in other languages, and which is normally translated by native land, motherland, birthplace. The writer Bernhard Schlink attributes the meaning of utopia to this word, the non-place which exists only in thought, starting froman absdence, a desire, an in-between " entre-deux ". "It is this curious blend between proximity and distance, between past and present, between idealized vision and lived reality that seems to be the common thread underlying my D'Allemagne photographs. " ". I now live in another culture and see my first country with foreign, albeit familiar eyes.
The same villages and landscapes still exist, more or less transformed, and more or less the same people, family and friends, along with their gamut of relations, from the intimate to the foreign not forgetting indifference. All of this, that which formed me, that which I rejected as well, became my present once more, if only for a while. How to translate these ambivalent feelings, this sensation of finding myself in-between, into images? I thus decided to avoid having them and to let myself be guided by appearances: the low hanging skies, the soft hills, the daily ordinary activities of people who are sufficiently close to me to accept my gaze, forget my presence. The ensemble of images reveals a vision as partial as it is one-sided of this small part of Germany which formed the microcosm of my first twenty years.
Images of the East come mingle with these of the South. It is in fact only a part of the East, of these places so loaded with history that they have become banalities. I wanted to proceed as if I could find a Gerlman identity through the culture, by going to Weimar, Dessau, l'île de Rügen so linked to the painter C. D. Friedrich,all the while conscious that these places are above all places firmly anchored in their banal and hard reality of today.
Villages, landscapes, people, interiors, cities: these series which seem at first glance heteroclite complement each other in fact. They form an ensemble where the whole is greater than the sum of the elements added together. Ultimately, what ties me Germany, is as much a personal lived experience as it is my cultural attachment to this country. It is perhaps the mixture of belonging and distance that renders these images of Germany somewhat melancholy. For where is my Germany to be found? Is it not in the end a fiction, a reinvented Heimat?
Brigitte Bauer, January 2003


Sans titre, 53, 41, 49, 15 2002
C-Print, 40 x 40 cm chacune
Vue de l’exposition Art Rotterdam, Galerie Polaris, Rotterdam, Pays-Bas
Courtesy Galerie Polaris

Sans titre 1 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 53 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 49 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 15 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 41 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 7 2002
C-Print, 40 x 40 cm

Sans titre 23 2002
C-Print, 40 x 40 cm

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