Caroline DUCHATELET 

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Aubes noires / Crépuscules Black dawns, twilights Lire Read

Filmer l'aube, c'est accueillir la naissance du visible. La montée progressive de la lumière du jour révèle la matière du monde et trace ses contours. Le temps de la vidéo, la métamorphose continue de l'image manifeste l'extrême plasticité du visible, son infinie puissance d'apparition et de disparition, de figuration et de déformation.

Le geste de Caroline Duchatelet est un rituel d'accueil et d'attention, une sorte de cérémonie immobile répétée pour chaque aube. Choisir un lieu et un moment, définir un cadre, laisser la lumière faire son oeuvre en silence. Ce qui a lieu dans l'image ne relève pas tout à fait de l'épiphanie ou de la révélation : car la lumière ne dévoile pas une image définitive, ne fixe aucun cliché ; elle module la variation continue du sensible, préside aux jeux immanents du tracé et de la couleur, de la surface et de la profondeur. Certes, dans la plupart des vidéos, le travail de la lumière fait advenir une image. Mais la vidéo ne s'achemine pas vers celle-ci comme vers une conclusion, un but. Elle accomplit l'opération inverse : à rebours du cliché connu, stable, tel que nous avons l'habitude de le voir, il s'agit de remonter vers un état instable, d'avant la composition. Les aubes de Caroline Duchatelet ne racontent pas une histoire de l'image, elles s'attardent dans sa préhistoire.

Cyril Neyrat
Notes sur trois films de Caroline Duchatelet (extrait)
La compagnie / FID Marseille, 2011


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To film daybreak is to take in the inception of the visible. The gradual increase of daylight both unveils the material world and defines its contours. During the video, the image’s constant metamorphosis demonstrates the extreme plasticity of the visible, its infinite ability to appear and to disappear, to give form to and to deform.

Caroline Duchatelet’s gesture is a ritual that is both a welcome and a moment of attention, a quiet ceremony repeated for each new dawn. To choose the place and time, to define the frame, and to let light carry out its work, in silence. What takes place in the image is not exactly an epiphany, or revelation: For the light does not reveal a definitive image; it does not expose a picture. It shapes the constant variations of the perceptible, governing the inherent games of line and color, of surface and depth. Of course, in most of these videos, the play of light does in fact give rise to an image. But the course of video is not determined by an image per se, like some conclusion or final destination. Quite the opposite is true, the reverse of the familiar and stable snapshots we so often see. Indeed, it is a question here of returning to that state of instability preceding composition. Caroline Duchatelet’s daybreaks do not recount the history of an image—they dwell on its prehistory.

Cyril Neyrat
Notes on Three Films by Caroline Duchatelet (excerpt)
La compagnie / FID Marseilles, France 2011


 
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Tout ici est passage, devenir, transition : davantage qu’une succession de formes, chaque vidéo donne à éprouver une déformation continue, la transformation sans repos d’un entre-formes. L’image n’a plus pour fonction de présenter une forme, mais de restituer un procès de déformation. Les vidéos de Caroline Duchatelet sont une pure manifestation de l’image telle qu’a invité à la repenser Bergson, et Deleuze à sa suite : image-durée, image-temps. Ou, selon la splendide formule de Bazin, le cinéma comme «momie du changement». C’est ainsi l’origine du cinéma qui fait retour dans ces vidéos : l’image cinématographique comme pure image-durée.

Cyril Neyrat
Notes sur trois films de Caroline Duchatelet (extrait)
La compagnie / FID Marseille, 2011


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Everything here is passage, becoming, transition: more than a succession of forms, each video offers the experience of a continuous deformation, the restless transformation in-between the forms. The image no longer has the function of presenting a form, but of rendering a deformation process. The videos of Caroline Duchatelet are a pure manifestation of the image as Bergson invited us to rethink it, and then Deleuze: duration-image, time-image. Or else, according to Bazin’s splendid expression, cinema as «mummy of change». It is thus the origin of the cinema that returns in these videos: the cinematographic image as pure duration-image.

Cyril Neyrat
Notes on Three Films by Caroline Duchatelet (excerpt)
La compagnie / FID Marseilles, France 2011

 
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