Timothy MASON 


La vitrine magique 1994
Transparences
Cibachrome, 20 x 30 cm

Timothy Mason a d'abord travaillé à l'aide d'un sténopé, un dispositif photographique rudimentaire sans objectif. Il a produit de la sorte une série remarquable de vues d'intérieurs d'espaces publics ou semi-publics, lieux de consommation, de transit, ou de pouvoir, tels que supermarchés, aéroports, bowlings, piscines, salles de conférences, etc. Le rendu particulier du sténopé, le mélange de profondeur de champ et de faible définition, les couleurs glauques, accentuent l'étrangeté de ces lieux (ou plus exactement "non-lieux") qui sont en train de devenir notre milieu naturel. Il ne s'agit pas chez lui d'en saisir la monumentalité écrasante, ou d'en tirer des études de composition et de rythme, comme parfois chez Andreas Gursky. L'organisation en triptyques de ces image affiche le caractère fragmenté et composite de la vision, et sans doute de ces espaces eux-mêmes, qui ne s'offrent jamais entièrement et spontanément au regard. Les travaux récents, dont un ensemble inédit est présenté ici, sont réalisés à partir d'images découpées dans des catalogues qu'il utilise comme des matrices. Le recto et le verso de l'image se lisent alors en surimpression, ainsi que les effets de trame. Timothy Mason obtient ainsi une matière (une substance) complexe : le discours publicitaire se trouve parasité et révèle de très intéressants effets de sens qui concernent les codes gestuels ou discursifs du travail, du pouvoir, de l'information. L'image produite résulte d'un recyclage, d'une sorte de compression, qui donne naissance à un matériau visuel inédit, qui tient de l'imprimé, du pictural,et du photographique à la fois.

Régis Durand, in Catalogue Printemps de Cahors, 1996