Eric BOURRET 

Dans la montagne de Lure

D’abord, il y a la montagne de Lure, masse rocheuse à l’intersection des Alpes et de la Provence, située, comme on peut s’en douter, au sud-ouest des Alpes-de-Haute-Provence, et qui culmine à 1826 mètres. Ce n’est qu’une montagne parmi toutes celles qu’Eric Bourret a parcouru, non pour les figer définitivement mais, au contraire, pour les mettre en mouvement. Le contraire du truisme photographique, en somme. C’est sans doute pour cela qu’il affirme faire de l’art, contemporain si possible, avant que de faire de la photographie. Affirmation paradoxale puisque son travail ne peut exister que par le médium photographique, sa vision borgne, ses imperfections, la chimie de son tirage.
Son travail de décalage de l’image, de superpositions, de recherche pédestre du point de vue comme objet unique, n’est sans doute pas la photographie. Peut-être seulement une photographie qui serait toujours complexe, aux confins de plusieurs zones, de plusieurs idées, et de certaines facultés de comportement ou de création. Pour entrer dans le vif du sujet, quelle donc est cette démarche proche de l’art contemporain et totalement ancrée dans la photo, qu’on pourrait définir comme (à cause de ses côtés ludiques, manipulatoires et surtout analytiques) l’antichambre de la perception ? Cette démarche où se superposent une image première lisible à priori et une image seconde suffisamment surprenante et énigmatique pour obliger le spectateur à analyser la proposition qui lui est faite et à en chercher les sources et les aboutissants.
On pourrait imaginer cette photographie comme un immense « memento mori », un lacis inextricable de traces fragiles vouées à l’oubli, un massif de mémoires tremblantes, de lignes bougées, un cénotaphe vide consacré à l’infime durée des choses de ce monde. En auquel cas, toute photographie (et surtout celles d’Eric Bourret) serait une vanité, cette horreur de l’éphémère, le point de basculement entre l’existence et l’effacement, presque la frontière métaphysique de toutes choses. Pouvoir saisir l’apparence de l’objet réel, sa peau seule, son enveloppe matérielle, aurait été l’offre d’un démon nommé Daguerre à l’humanité inconsciente. Il n’était plus besoin de la lenteur du dessin et du recouvrement laborieux de la peinture pour fixer tout ce qui est digne de rester, à l’aune de l’individu et non de l’histoire. Un simple clic et le tour est joué. Car il s’agit bien d’un tour, de magie ou de passe-passe. L’intangible prend corps, l’anodin devient image. Cette vision aurait des liens serrés et quasi généalogiques avec l’art éphémère de l’extrême fin de vingtième siècle et du début encor vagissant du siècle suivant, une causalité sans faille avec « le presque rien et le je-ne-sais-quoi ». Dans cette proposition, l’œuvre d’Eric Bourret aurait une place de choix, ses liens avec la concrétion, l’effacement programmé, mais aussi avec le monument tumulaire, tutélaire, étant très fortement marqués, insistants même. Avec la capacité de transformer l’image lisible en son contraire, de faire du paysage une œuvre de Land Art transformable à sa volonté. Et cela en redoublant le clic initial afin qu’une partie de l’image se désintègre sur la pellicule avant de se concrétiser.
On pourrait également imaginer la photographie telle que la pratique Eric Bourret comme la somme totale de toutes les mémoires de l’œil, car il ne peut exister de mémoires sans oubli. Une plaque sensible sans limites, qui serait le réceptacle de chaque couche de forme et de sens. Une superposition sans fin de toutes les réalités pour parvenir à une seule image. Peut-être serait-elle blanche, peut-être serait-elle noire, c’est selon. Elle entretiendrait avec les superposeurs de tout acabit, avec les voileurs de pellicules et les bougeurs de caméras, les photographes sans appareil et les bricoleurs de chambres, des relations troubles et attirantes qui sonneraient le glas des formes réelles, des contours identifiables et des masses reconnaissables. Un feuilletage de la réalité imagée qui tiendrait peu de place et pourrait se glisser dans la mince couche de gélatine de la photographie. Or les images d’Eric Bourret sont toutes remplies de ces superpositions infimes, semblables à un brouillage mais nourrissant abondamment le regard de leur complexité. Une complexité de construction qui n’exclue pas une grande simplicité de lecture, où l’émotion affleure comme un souvenir qui peine à réapparaître tout en laissant deviner qu’il est là, latent, prêt à émerger. Mais cette superposition ne doit rien au hasard ou au bougé, elle s’engendre par la mise en place d’une procédure qui peut se répéter d’image en image, qui se réédite de procédure en procédure afin de comprendre (pour le spectateur comme pour l’artiste) ce qu’il peut advenir de différent au sein du même. Il n’est pas besoin de chercher bien loin dans l’histoire de la photographie pour retrouver des images de montagnes. Elles font même partie d’un genre extrêmement prisé au dix-neuvième siècle. Parce qu’elles sont une sorte de climax du paysage romantique. Ce n’est pas la préoccupation d’Eric Bourret, pas plus que celle d’un Richard Long ou d’un Hamish Fulton, par exemple. La montagne est là pour sa morphologie plus que pour sa symbolique, pour la raréfaction (de présences, de formes, de nuances) qu’elle entraîne plus que pour sa photogénie. On remarquera d’ailleurs que dans la série ici présenter, quelques présences humaines identifiables apparaissent en petit nombre, en contradiction légère avec les règles tacites édictées il y a longtemps.
On nous dit depuis déjà longtemps que la photographie n’est plus fiable, en tant que technique et en tant que représentation. Loin de l’inébranlable des solutions chimiques du dix-neuvième siècle, les procédés commerciaux de notre temps s’effaceraient, s’effaceront, en dix ans, en trois ans, voire moins en ce qui concerne le Polaroïd ou l’imprimante de salon (bien que nous arrivent des processus pharamineux et dès durées d’un siècle à tout le moins. La boulimie d’images des amateurs et des professionnels est comme remise en cause avant que la photo soit faite. Cette précarité inscrite comme un destin inéluctable donne à la prise de réalité photographique une instabilité tragique. Un destin la marque qui est celui de la révélation. L’instant d’avant, il n’y avait rien, l’instant d’après ne reste que la marque brûlante d’un fait dont ne jurerait pas de l’existence. C’est aussi ce qui entache de fragilité la photo de reportage et le scoop. Ne jamais savoir si cela représente le bon moment, celui que décrit le texte et que le photogramme tente de cerner tant que faire ce peut, sans jamais indiquer si le point culminant est celui qui se lit. Chez Eric Bourret, ce tragique est à l’œuvre mais dans une autre figuration. Dans son obstination à construire du transitoire, du peu ou du presque, à relier les gestes qui sont ceux du bricoleur (mais au sens où le développe Claude Lévi-Strauss dans « La pensée sauvage », celui de l’invention et de la survie, celui du faire avec l’entourage immédiat pour trouver une solution viable) à ceux du sculpteur, les gestes de l’artisan d’autrefois à ceux de l’artiste d’aujourd’hui. Ce tragique-là gît dans la profondeur de l’image obtenue, nourrie de ses contradictions et de sa polyvalence. Si une représentation est polysémique, c’est bien celle-là, qui ne se laisse pas réduire à son sujet. D’ailleurs qui sait si le sujet est à montagne de Lure ou le redoublement de l’image ?
On a assez dit, jusqu’à en faire un stéréotype que l’objectif photographique était un piège à image. L’immatérialité de l’image est aussi rattrapée, ici, par l’immatérialité des choses de la cosmologie et de la météorologie, le vent, les nuages, le brouillard, les reflets, le mutable. Par la présence, et l’interaction sur l’image, de plusieurs clichés identiques légèrement décalés, même la roche peut devenir liquide, comme l’eau peut se durcir et se fossiliser. Quelles manœuvres de coercition, quelles tactiques d’approche doivent-elles êtres développés devant tant d’insaisissable ?Les procédures mises en jeu par ces pérégrinations argentiques permettent de voir le contraire de ce qui se montre en même temps que celui-ci. Certains photographes, comme Georges Rousse se disent essentiellement peintre, et d’autres pourraient prétendre à la fonction de sculpteurs. Dans le travail d’Eric Bourret, chaque œuvre superpose, en même temps que des prises de vue, le photographe, le peintre et le sculpteur, sans que l’un soit plus présent que ses alter ego : si un jour l’un se met à prédominer, il n’y aura plus d’image.
Sans entrer dans le monde infini des paradoxes, le parcours d’Eric Bourret se veut une démarche. Mais comprise entre ce qui se fait intentionnellement et toutes les barbes du temps et de l’à peu près. Entre ce qui construit l’image et ce qui s’insinue en elle sans que l’appareil y prenne garde. Entre la conscience du photographe et l’inconscient de la photographie. Alors, autant que d’une démarche, qui le situe d’autorité dans le camp des plasticiens, il pourrait bien s’agir aussi de l’élaboration d’une méthode, si l’on en croit le « Petit Larousse ». Méthode n.f. (latin Methodus) manière de dire, de faire, d’enseigner une chose, suivant certains principes et avec un certain ordre: procéder avec méthode. // Démarche ordonnée, raisonnée; technique employée pour obtenir un résultat: procéder avec méthode, une méthode de lecture. // Ouvrage groupant logiquement les éléments d’une science, d’un enseignement. // Philos. Ensemble des règles et des procédés permettant de parvenir à la vérité. Méthode expérimentale, procédure qui consiste à observer les phénomènes, à en tirer des hypothèses et à vérifier les conséquences de ces hypothèses dans une expérimentation scientifique. Une vérité scientifique malaxée par le hasard, l’instant fatidique et la poésie.
La citation est un peu longue, mais éclaire comment et pourquoi une méthode en art ou en photographie, et aussi comment y parvenir. Les sentiers qu’emprunte notre photographe sont en effet méthodiques, obsessionnels, prudents mais inventifs. Quelque chose du dernier moment possible pour saisir un réel en dilution oblige aux grands moyens : employer autant de rigueur que de souplesse, autant de méthode que de démarche.
Ayant défini l’œuvre et la méthode comme se démarquant volontairement de celles qui sont admises par le genre et le médium, il est difficile de dresser un arbre généalogique construit, logique et évident. Comme pour ses sources ou ses matériaux, le cadre de ses pères ou de ses pairs est composite et multiple. Non pas qu’il s’agisse d’autant d’objets trouvés que dans les autres domaines édifiant son œuvre, mais il n’est pas possible de ranger Eric Bourret dans un groupe cohérent qui le définirait autant qu’il en ferait partie. Sa position est trop flottante, son comportement trop sensible, son parcours trop individualisé pour le nommer d’une seule étiquette, d’une seule définition. Le fait que l’époque soit au refus, dans les faits plutôt que dans les mots, des mouvements revendiqués surligne cette position. Sans doute par peur de sombrer dans la masse des conformismes, les avant-gardes (les historiques comme celles des années mille neuf cent soixante) et les archipels de groupes qui en étaient issus, avaient tablé sur une lisibilité faite de déclarations, de manifestations et de proclamations écrites. Depuis vingt ans, il n’est plus question de regroupements idéologiques ou formalistes. Chaque œuvre est une aventure qui ne tente pas de surpasser ou de défaire les aventures qui précèdent ou coexistent. On n’inscrira donc pas Eric Bourret dans un arbre, fut-il généalogique. Mais sa proximité avec les artistes nomades de tout profil qui se sont mis en quête de l’immensité du monde ses dernières années, n’est sans doute pas pour lui déplaire.
Pour en finir, il y a encore la montagne de Lure. C’est là qu’il voit pour la première fois ses semblables dans son viseur. C’est là que les valeurs de ses images s’inversent. Lourdes, noires et minérales, elles deviennent blanches, légères et gazeuses. Elles succèdent à des formats panoramiques, elles seront donc carrées. Leur poids venait de leurs représentations, c’est dans le cadre que, maintenant, il se niche. Elles n’hésitent plus à se confronter à elles-mêmes, elles peuvent être grandes et petites en même temps. Et leur exposition peut réserver des surprises qu’on ne dévoilera pas.
Sacrée montagne de Lure.

François Bazzoli, 2010

 
 

On Lure mountain

To begin with, there’s the rocky mass of Lure mountain, rising to a height of 1,826 metres in the south-west of the Alpes-de-Haute-Provence department – at the intersection of the Alps and Provence, in fact. It’s one of the many mountains over which Eric Bourret has tramped, not to immobilise them but, on the contrary, to set them in motion. The opposite of a photographic truism, in sum. And this is doubtless why he says he does art, contemporary if possible, prior to doing photography – a paradoxical statement, given that his work can exist only through the photographic medium, with its one-eyed vision, its imperfections and the chemistry of its printing process.
Bourret’s shiftings of the image, his superimpositions and searches for viewpoints as unique objects may not exactly constitute photography – or if so, it’s a complex type of photography, on the boundaries of several zones, several ideas, several faculties of behaviour and creation. In the final analysis, what is his approach? It’s close to that of contemporary art, and yet totally rooted in photography; it could be defined (given its playful, manipulative and, especially, analytical aspects) as an antechamber of perception, in which a primary, immediately legible image is combined with another, whose surprising, enigmatic character requires the viewer to analyse the submitted proposal, to seek out its sources and objectives.
This kind of photography might be seen as an immense memento mori, an inextricable interweaving of fragile traces doomed to oblivion, a mass of trembling memories and side-shifted lines; an empty cenotaph dedicated to the evanescence of worldly things. In which case every photograph (and in particular the kind that Bourret creates) is a vanitas representing a horror of the ephemeral, a tipping point between existence and elimination; notionally, the metaphysical frontier of all things. And it was an opportunity to seize the appearance of the real object, its surface, its material envelope, that was being offered by the demon Daguerre to unsuspecting humanity. There was henceforth no need for the slowness of drawing, or the laborious application of paint, to stabilise that which was deemed worthy of conservation – and on the scale of the individual, not that of history. A simple click now does the trick; because it is a trick, either of magic or legerdemain. The intangible becomes solid, the anodyne becomes image. This vision has close, almost genetic connections with the transient art of the late 20th century and the still wailing start of the following one, in a flawless form of causality based on the almost-nothing and the who-knows-what, in which Bourret’s work occupies a place of choice. His links with concretion and programmed obliteration, but also with the tumular, tutelary monument, are strongly marked; insistent, even; and capable of turning a comprehensible image into its opposite, or a landscape into a work of Land Art, subjugated, with a doubling of the initial click that makes a part of the image disintegrate on the film before taking concrete form.
Photography as Bourret practises it might easily be seen as the sum total of the eye’s memories, because there can be no memory without forgetfulness. A sensitive plate without limits; a receptacle of shape and sense in every stratum; a ceaseless superimposition of all realities in order to end up with a single image. It might be white, it might be black; depending… With its superimposers of every stripe, veilers of film and shifters of apparatus, photographers without cameras and improvisers of casings, it maintains obscure, attractive relations that sound the knell of real forms, identifiable contours and recognisable masses. This leafing of imaged reality takes up little space, and might be inserted into the photograph’s thin layer of gelatin. But Bourret’s images all feature infinitesimal blurred superimpositions, while abundantly nourishing the eye with their complexity – a complexity of construction that does not preclude simplicity of interpretation, in which emotion is a memory that has trouble breaking through, while still allowing one to suppose that it is there, latent, ready to emerge. And the superimposition owes nothing to chance, or to movement; it is generated by the implementation of a procedure that can be repeated from image to image, from procedure to procedure, so that the emergence of difference within sameness may be apprehended (both by the viewer and the artist). One does not have to go far in the history of photography to find images of mountains – this was a favourite 19th-century genre, a sort of climax of the romantic landscape. But it’s not Bourret’s main preoccupation, any more than that of, for example, Richard Long or Hamish Fulton. The mountain is there for its morphology rather than its symbolism; and for the rarefaction (of entities, forms, nuances) that it implies, rather than its photogenics. It might also be noted that in the series discussed here, in a violation of tacit rules formulated ages ago, there is a scattering of identifiable human figures.
We have long been told that photography is no longer reliable, either as a technique or as a form of representation. Unlike the unalterable chemical solutions of the 19th century, those that are currently available fade out in ten years, or three years, or even less in the case of Polaroids or home printing (though there are also some that should apparently last a century). The thirst for images – on the part of both amateurs and professionals – may thus be called into question even before a photograph is produced. This precariousness, seen as ineluctable destiny, gives photographic reality a tragic instability which is equally that of revelation. The previous instant, there was nothing; the following instant there will only be the searing mark of a fact whose existence could not have been sworn to. This is also what lends fragility to the reportage photo and the scoop. There’s no knowing if it’s the “right” time, in other words the one described in the text, the one the photogram attempts to encompass, as far as possible, without ever indicating whether the culminating point is the one that can actually be perceived. The tragic is at work here, but in another kind of figuration, in Bourret’s obstinate resolve to construct the transitory, however slightly or approximately, and to articulate the activity of the “bricoleur” (as developed by Lévi-Strauss in The Savage Mind, i.e. that of invention and survival, and of elaborating viable ideas along with one’s immediate entourage) onto that of the sculptor, or the activity of yesterday’s artisan onto that of today’s artist. This tragic problematic lies in the depth of the image obtained, with all its contradictions and polyvalence. And if any representation is polysemic, this must surely be it, irreducible as it is to its subject. In any case, who knows whether the subject is Lure mountain or the doubling of its image?
It has been said often enough (to the point of stereotyping, indeed) that the photographic object is an image trap. Here, the immateriality of the image is mirrored in the immateriality of cosmology and meteorology: wind, clouds, fog, reflections, changeability. Through the presence and interaction of identical but slightly out-of-sync images, rock becomes liquid, and water hardens, fossilises. What coercive manoeuvres or tactics can be deployed, in the face of such evasiveness? The procedures used in these silver-gelatin peregrinations make it possible to see both what is shown and its opposite. Some photographers, such as Georges Rousse, consider themselves, essentially, to be painters; others might claim to be sculptors. With Bourret, each work syncretises, besides images, the activity of the photographer, the painter and the sculptor, though without preeminence. If one of them were to gain the upper hand, there would be no possibility of an image.
Without entering into the infinite world of paradoxes, Bourret’s path is an “approach”. But it is intercalated between what takes place intentionally and the rough edges of time and imprecision; between what constructs the image and what slides into it unbeknown to the camera; between the photographer’s consciousness and the photograph’s subconscious. And so, rather than representing a volition placed under the authority of the artist, it might just as easily involve the elaboration of a method, if one were to go by the Petit Larousse: “Method (Latin methodus): a manner of saying, doing or teaching something, according to certain principles and in a certain order; to proceed with method. // An ordered, reasoned approach; a technique used to obtain a result; a reading method. // A work that logically brings together the elements of a science; a teaching method. // Philos. A set of rules and procedures that make it possible to establish truth. An experimental method or procedure that consists of observing phenomena, deriving hypotheses and verifying their consequences in scientific experimentation.” A scientific truth subjected to chance; the fateful instant; poetry.
This somewhat lengthy definition elucidates the whys and wherefores of method in art (or photography), and also how to achieve it. The pathways taken by Bourret are in effect methodical, obsessional and cautious, but inventive. Something of the last possible moment for seizing reality in a state of dilution makes it necessary to pull out all the stops: to call on rigour as well as flexibility, “method” as well as “approach”.
Having defined Bourret’s work and method as deliberately standing apart from what is generally admitted by the genre and the medium, it is difficult to present a constructive, logical, obvious genealogy for him. As with his sources and materials, the identity parade of his predecessors and peers is composite and multiple. Which is not to say that it is a question of found objects, in this instance, as in other areas of Bourret’s work, but that he cannot be identified with a specific group, any more than he truly belongs to one. His position is too labile, his behaviour too sensitive, his career too individualistic to be characterised by a single label or formula. This is an age of refusal, in terms of facts rather than words, as regards movements that people identify with. Undoubtedly fearful of sinking into a morass of conformisms, the avant-gardes (the historical ones, as well as those of the 1960s) and the archipelagos of groups they engender rely on the transparency of statements, demonstrations and proclamations. For the last twenty years, there has been no question of ideological or formalistic groupings. Each work is an adventure, without any attempt to outdo, or undo, preceding or current adventures. Bourret cannot be “attached” – not even to a family tree – though he presumably wouldn’t mind being likened to those nomadic artists of every profile who, over the last few years, have begun exploring the immensity of the world.
To sum up: there’s still Lure mountain. This was where, for the first time, Eric Bourret saw fellow creatures in his viewfinder. This was where the values of his images became inverted. Formerly heavy, black, mineral, they are now light, white, gauzy. Formerly panoramic formats, they are now more recognisably rectangular. Their density comes from their representations (and the photographer is currently in the frame). They no longer hesitate to confront themselves; they can be simultaneously large and small. And exhibiting them gives rise to surprises that we won’t, or can’t, reveal.
Some mountain, Lure!

François Bazzoli, 2010

 
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