Florence-Louise PETETIN 

Lire le texte de Pierre Wat, « Jungle de l'innocence », 2014


Lire le texte de Jean Pierre Cometti, in monographie, « Je suis ciel et terre », édition Al Dante + english translation


Lire le texte de Frédéric Valabrègue : « Ornements à la peinture de Florence », in revue Il Particolare N°19 &20, 2009 + english translation


Lire « L'envers du paysage », entretien de Florence Louise Petetin avec Jean Pierre Cometti, in revue Il Particolare N°19 &20, 2009


Lire le texte de Jean Poussin : « Florence Louise Petetin – Mal vu », novembre 2007


« Baisse les yeux »

Un ensemble de petites toiles très colorées, un entrelacs de formes d'apparence dissipatives et paradoxalement individualisées. Une série qui, à l'image d'un film, se déroulerait et n'inciterait pas à une attention tournée vers le détail. Sitôt abandonnée la vision d'ensemble, le regard se laisse pourtant guider par d'autres inférences que la succession, le déroulement ou d'un hypothétique récit. Comme dans d'autres oeuvres de plus grandes dimensions, la vision se conjugue ici à un temps propre, encore cinématographique, mais qui ne se fond qu'en apparence en une continuité narrative, que l'on sent empêchée.
La tension qui pourrait en naître transparaît à peine dans les « sujets » qui se déploient sans réellement communiquer, sujets qu'on pourrait dire ordinaires, débarrassés du pathos de l'intériorité. Une peinture « en extérieur », qui rappelle certains peintre américains, Homer, par exemple. Florence Petetin a réalisé ces toiles à partir de photographies - celles qu'elle prend elle-même ou qu'elle emprunte à diverses sources comme internet. Ni figuration ni abstraction, ni récit ni parataxe, son travail invite à réfléchir à la relativité de la représentation (entre la photographie ou le cinéma, pris ici à revers, pour ne pas dire à leurs propres pièges) et à ce qui s'y montre d'imprévisible : de brutales émergences de couleur pure. Un côté « fauve », incongru,
La peinture de Florence Petetin n'est pas « correcte ». Elle peint à contre temps ou à contre emploi. Ce qui tendrait vers la représentation reste en suspens ­ d'où le flou ou le côté hachuré de certaines figures qu'on pourrait dire en mouvement, à quoi il faut ajouter le doute dans lequel elle installe ses tentatives, ses expériences. C'est ce qui la conduisit, un mois durant, à peindre au bureau, à se rendre, pendant un mois, à son travail, comme une secrétaire, à se vêtir en conséquence et à substituer une activité (peindre) à une autre (le secrétariat), en posant la question même du “travail”.
Dans cette expérience-là, il était également question de sexe, ce qui rapproche la « peinture au bureau » de la pornographie, en même temps le sexe et le travail, la débauche opposée à l'embauche. Des deux préfixes, et s'il fallait choisir, lequel préférerions-nous ? Le trouble qui marque les tentatives de Florence Petetin, et dans lequel elle installe qui s'y montre attentif, tient à ce qui, dans ses oeuvres, nous regarde. S'agit-il d'un semblant, à quoi l'art pourrait encore renvoyer ? La fiction possède la vertu de montrer ce que ne montre pas la représentation illusoire. Le trouble lui est essentiel, comme le suggère l' « Unheimlich » freudien, l'inquiétante étrangeté. Dans ses tableaux « pornographiques », Florence Petetin rend le sexe à la fiction, c'est-à-dire à l'amour, à la mort, à son indétermination, et à sa poussée essentielles.

Jean-Pierre Cometti