Emilie PEROTTO 

Visuel pour la communication web de l'exposition You can only see the shape on the (back)ground, see the shape, galerieACDC, Bordeaux, 2011

Les corps morts ne doivent jamais toucher le sol 2011
Topan, acier inoxydable, 300 x 200 x 295 cm
Vues de l'exposition You can only see the shape on the (back)ground, see the shape, galerieACDC, Bordeaux, 2011

En janvier de cette année, Émilie Perotto a redécouvert le lac de Serre-Ponçon, dans les Hautes Alpes. En mai, quand elle a terminé la réalisation du Dahu avec douze lycéens, elle se languissait déjà d’être en juillet pour l’exposition Passages au centre d’art les Capucins et revoir un lac bleu turquoise, plein à n’en plus finir de se remplir.
Entre janvier et juin de cette année des choses ont bougé. Beaucoup. Émilie a travaillé à cinq projets spécifiques ; la Forêt d'Art Contemporain à Arue, la réalisation du Dahu, l’exposition d’ouverture du centre d’art les Capucins avec la réalisation de deux nouvelles sculptures, l’Art Contemporain et la Côte d’Azur et l’anticipation obligatoire des expositions de rentrée, parmi lesquelles figurent la GAD à Marseille et la galerieACDC à Bordeaux. Entre janvier et juin, Émilie Perotto a fait quatorze allers-retours en train entre Marseille et Embrun, de longues heures propices pour faire mûrir les projets en cours et accueillir le changement. Qui dit transitions, dit expérimentations, tâtonnements. Une période forte à respecter dans tout travail d’artiste, souvent peu mise en avant car synonyme d’erreurs possibles, de productions moins bonnes. Or c’est souvent dans ces instants que tout se joue, et dans la prise de risque du commissaire - critique qui accompagne l’artiste et chez l’artiste qui abandonne une partie de ses croyances, les fondements de son identité plastique.
Changer d’échelle, travailler l’espace au corps, choisir la relation de la ligne à l’espace plus que de la matière à l’oeuvre, creuser les espaces induits par le vide, aller vers l’interstice pour mieux se jouer de l’espace vacant. Assumer les anciennes formes familières pour mieux les renverser au profit d’objets désormais utilisés comme citations de formes, citations tout court. Insister sur l’unité absolue, le renvoi constant au centre de la sculpture, lui rappeler le pouvoir (ou le devoir ?) de n’être que ce qu’elle est. Inscrire la force (interprétative) de la sculpture dans son unité de construction. Accepter de s’abandonner au matériau encore inexploré.
Fuir les brèches narratives extrapolées et extérieures à l’objet produit. Contenir le sens dans ce que la sculpture a à donner. Offrir des synthèses de formes et influences du quotidien dans les sculptures.
Rien de praticable, sinon l’expérience de l’espace grâce au travail personnel que chacun fait par l’intermédiaire de la sculpture. Faire respirer l’espace et encourager l’expérience sculpturale de chacun.
Émilie Perotto ne dissémine rien. Elle rassemble pour superposer tout en une seule vision. Les éléments de la sculpture sont là pour réunir un pan de l’espace en un seul objet d’attention. Pour la galerieACDC, elle opte pour une sculpture au sol ; loin des sculptures murales réalisées pour ses expositions les plus récentes au centre d’art les Capucins, à Coaraze ou à l’Espace à débattre. C’est un nouveau défi, un nouveau changement d’échelle et la recherche de tension et d’équilibre. Deux barres asymétriques réinterprétées pour figurer deux lignes sur lesquelles sont fixées de longues lances en topan noir et jaune ; une incursion discrète mais nette de la couleur dans son travail. A n’en pas douter, la prochaine étape pour Émilie est de prendre la couleur « à bras le corps »…
Émilie invente au quotidien son processus de travail avec des cahiers des charges qu’elle s’impose. C’est un enrichissement de tous les instants, une chance. Ses propositions transcrivent une grande franchise et un engagement plein et entier.

Caroline Engel, curatrice
juin 2011

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