Franck LESBROS 

Olision valley 2014
Vue du ShowRoom Art-O-Rama 2014
Olision valley 2014
Video, HD, 5 :50 min

 

Olision valley 2014


Dans Olision Valley (2014) le regard va et vient, s’engouffre dans le relief, remonte vers la surface, ausculte des terrains ni accueillants ni hostiles, curieux plutôt. La dernière production vidéo de Franck Lesbros laisse s’enchainer plusieurs paysages de vallées dans un rythme donné par l’alternance des plans et une bande-son spécialement composée pour le film ; comme il est d’usage pour chacun de ses projets, souvent en collaboration avec des musiciens participant au processus. C’est ici un piano désaccordé qui fut mis à contribution, afin de générer des sons étirés et une musique toute en distorsion, captivante autant que les images.

Dans cette atmosphère faussement minérale où prévalent des tonalités de noir et de brun, une attention toute particulière est portée sur la lumière, élément indispensable dont la fluctuation, et notamment l’éclair, permet d’enchainer les plans en faisant perdre toute logique spatio-temporelle à l’action et de dramatiser la scène tout en insistant sur la suite de petites catastrophes – éboulements, explosions, incendies... – émaillant la promenade. Entre apparitions et disparitions s’écoule un monde presque évanescent, en perpétuel mouvement, dont les contours apparaissent impossibles à cerner tant ils relèvent d’un ailleurs, de mondes étranges, où rien n’est jamais lisse, où tout semble instable.
Tournées dans des maquettes spécifiquement conçues pour chaque projet, les vidéos de l’artiste deviennent de curieux objets au croisement du cinéma et de la sculpture, mais aussi de la peinture à travers la planéité de la plupart des segments de film travaillés dans des cadrages très frontaux, dont certains ne sont pas sans évoquer là Friedrich, ici Malevitch, et ailleurs d’autres encore ; d’autant plus qu’est là, comme souvent dans ses films, particulièrement travaillée l’élaboration de perspectives. Un monde et un cinéma « plastiques » donc, où la nature artificielle des lieux et son aspect toc sont amplement assumés et jamais gommés, comme pour mieux pointer une volonté de se rapprocher d’une réalité dont l’artiste a pleinement conscience qu’il ne peut parvenir à l’atteindre et ne cherche donc pas à jouer de l’illusion.

La fragilité intrinsèque à l’ensemble, au décor autant qu’à l’action, révèle en outre une volonté d’aborder le tournage de manière expérimentale. Car si un scénario est écrit en amont tout n’est pas contrôlé lors de la réalisation, laissant libre l’accident de se produire sans qu’il ne soit cherché à le contenir ; une manière de déjouer un ordonnancement programmé non sans adresser un pied de nez à l’aspect poli et laqué d’un pan de la production artistique contemporaine. Alors, une vision pessimiste que celle de Franck Lesbros ? Plutôt une volonté assumée d’activer le ressort de l’inconfort.

Frédéric Bonnet

 

In Olision Valley (2014) one’s eyes come and go, rush into the relief, come up to the surface, detect fields that are neither welcoming or hostile, but rather peculiar. The latest video piece by Franck Lesbros shows a series of valley landcapes which rhythm takes its source in the iteration of plans and a soundtrack specifically composed for the film—like in all his projects, where musicians often collaborate in the creation process. Here, an out- of-tune piano is used to create stretched sounds and a discordant music which is as captivating as the images.

In this fake mineral atmosphere where dark and brown keys are at stake, light becomes the important element which fluctuation, and in particular strike, enables to link together the sequences by the loss of all kind of spatiotemporal logic in the action while insisting on a series of small catastrophes such as landslides, explosions, fires... alongside the ride. Between appearances and disappearances—an a most evanescent world operates in a perpetual motion which bends seem elusive, revealing an elsewhere, and strange paths where nothing is never smooth, where everything seems mutable.
Filmed with models specifically procuded for each object, the artist’s videos become curious pieces at the crossroad between movies and sculptures, but also paintings through the flatness of most of the film’s parts that are shot with very frontal framings—among which can be reflected some Friedrich here, or Malevitch there, and many others elsewhere. All the more that, as often in his videos, per pectives have been meticulously thought. A world and a “visual” cinema where the artificial nature of the places and their fake aspect a e largely assumed and never hidden, as if to get closer to a reality the artist is fully aware of not being able to catch, even through tricks.
The intrinsic fragility of the overall, from the set to the action, reveals a will to apprehend the shooting in an experimental way. As, if a screenplay is written in advance, not everything can be controled during the making of the video, thus accident can happen without any need for containing it, a way to elude a programmed order and also, somehow, to thumb his nose at some of the the polished and glossed actual contemporary art productions. Is that to say that Lesbros has a pessimistic vision? Well, rather a determined will to activate the mechanisms of discomfort.


 

Olision valley 2014
Dispositif de tournage
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