Jérémy LAFFON 

Petit Glossaire d'Images Mentales 2005-2010
Pastels huile sur pages d’annuaire (chacune : 21 x 29 cm), épingles
Work in progress comprenant actuellement 250 pièces
Vues de l'exposition Parler ne fait pas cuire le riz, Galerie Le Radar, Bayeux, 2007

Pour l'ensemble Petit Glossaire d'Images Mentales, Jérémy a troqué le costume du Ping Pong Master Player pour enfiler le «bleu de travail de l'artiste contemporain ». Série de dessin au pastel gras sur des pages arrachées aux pages « blanches » d'un annuaire téléphonique. Il s'agit véritablement d'un travail au sens du labeur librement consenti, dans lequel l'artiste semble « s'éclater » (dans tous les sens du terme), littéralement un work in progress débuté ne 2005. Ce carnet de route de la pensée compte près de 200 fragments. L'un d'entre eux révèle « encore 478 pages » mais on se doute que cette improvisation dynamique peut déborder à l'infini. Si l'annuaire compte un nombre de pages limité, il est renouvelé tous les ans. On peut imaginer qu'il manquera toujours la dernière image. Jérémy incarne dans ce travail une sorte de scribe. Les dessins, sortes de graffitis domestiques, s'égrènent page après page où, comme le titre l'indique, Jérémy couche tout ce qui lui passe par la tête. Pas d'angoisse de la feuille blanche, c'est un type d'activité à la fois répétitif mais toujours renouvelé. Dès le départ, la page n'est pas vierge. Elle est le résultat de l'effeuillage d'une livre sans qualité littéraire. L'accrochage en patchwork leur redonne une verticalité. Un artiste honore son statut dans son activité, dans le faire, les mains dans le moteur. L'ensemble fonctionne ni comme critique, ni comme image globale d'un monde d'images, ni comme problématique mais comme un inconscient artistique affiché qui alimente de son flux continu d'images, de signes, d'attitudes et de mots une oeuvre de fait en perpétuelle évolution. Si on suit la logique du travail de Jérémy, il procède même d'une part de fiction dont l'équilibre se joue, celle de vouloir sans cesse repousser la fin, ce que Gilles Barbier appelle la « rumination ». Dans le faire du dessin, il consomme du temps de création, du temps de mise en œuvre de la « cosa mentale » et se révèle ainsi dans sa position d'artistes.

Luc Jeand'heur

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