Olivier BEDU 

Depuis 2010, les oeuvres éphémères des artistes invités par la Maladrerie Saint-Lazare et la Mission Arts plastiques de la Ville de Beauvais, agissent comme un matériau photosensible appliqué sur la trame historique et architecturale de la cité. Un révélateur qui donne une lecture inédite du territoire urbain, tisse des relations insoupçonnées entre le bâti, les circulations et les usages, souligne un détail ou ce qui parfois n’est encore qu’une ébauche, pour les projeter aux dimensions de la ville en mouvement. L’intervention du Cabanon Vertical, collectif marseillais composé d’architectes, de scénographes et de plasticiens, s’inscrit dans cette continuité des dialogues entre création contemporaine et lieux historiques.
La chapelle de la Maladrerie, la Cathédrale, le quartier St Jean, trois lieux que nous investissons avec des installations qui s’interrogent les unes les autres. Les éléments se questionnent, invitent le visiteur à aller d’un site à l’autre. Nous proposons un dispositif qui met en résonance les trois installations, comme trois parties d’un même ensemble. Et c’est en circulant sur tous les sites que l’on appréhendera l’œuvre dans sa globalité. La même forme est exploitée sous différents angles, qui permettent de percevoir un volume global. Cette forme reprend l’organisation spatiale de la chapelle de la Maladrerie Saint Lazare : le clocher, la nef, le transept. Selon son orientation et son implantation, l’objet se transforme et change d’identité : architecture insérée dans la chapelle médiévale, sculpture au pied de la cathédrale Saint-Pierre et mobilier urbain dans le quartier Saint-Jean. A travers ces installations, ce sont aussi des modes de perceptions et des sensations que nous explorons. Les installations s’éprouvent physiquement : traverser, faire le tour, s’installer. Etre dans, observer depuis l’extérieur, grimper sur. Egalement pensées en écho avec le contexte et l’histoire des lieux, elles cherchent à mettre en valeur un patrimoine ; parler de l’histoire passée - lieu d’accueil pour les lépreux, leur coupure au reste du monde - et contemporaine des sites - chantiers de revalorisation.


Géométries Variables #1, 2014
Bois de charpente peint
Ville de Beauvais, Communauté d'agglomération du Beauvaisis et La Maladrerie St Lazare, 2014
Photographies Philippe Piron

L’installation cherche à tisser un lien avec l’histoire de ce lieu, espace charnière entre les deux types d’occupants de la Maladrerie. D’autre part, une attention particulière a été prêtée au traitement de la lumière afin de retrouver la qualité première de cet espace voué à la spiritualité. En entrant dans la chapelle, un décalage surprenant s’opère alors entre ce que l’on s’attend à voir, et l’espace dans lequel on pénètre. Au lieu d’un espace en ruine  et spacieux, on le découvre épuré et précieux avec des volumes à échelle humaine. L’espace est ainsi redessiné pour tendre vers une forme de sérénité sans connotation religieuse. L’édifice d’accueil se raconte par bribe ;  un indice, un détail laissé apparent suscite la curiosité : des découpes faites dans les parois de la micro architecture cadrent les détails remarquables de la chapelle, racontent son passé ; des planches, espacées de manières irrégulière, jouent le rôle d’œil de bœuf et permettent de voir au delà de l’enveloppe de notre construction ; un jeu de gravier noir et blanc évoque l’interpénétration de la chapelle en ruine et de la microarchitecture rappelant les communautés qui s’y côtoyaient. 

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