Judith BARTOLANI 

Enfin et à nouveau, l'informe : un livre et deux sculptures de Judith Bartolani
English translation, click here

«[...] la colère fait grincer les dents, la terreur et la souffrance font de la bouche l'organe des cris déchirants. »1

Il conviendrait de poser à Judith Bartolani quelques questions abruptes: Pourquoi cette agitation? Pourquoi cette colère sourde qui gronde dans l'oeuvre? Pourquoi cette tension dans l'atelier? Pourquoi ce livre qui parle d'outre-tombe avec Sara? Pourquoi en faire apparaître les pages vives de la douleur et du supplice dans le gemmail de l'image numérique? Pourquoi ces mots qui tourbillonnent dans l'espace? Pourquoi cette représentation informe d'un stalag dans la couleur et la matière d'un crachat? Pourquoi avoir rompu avec la consensuelle appartenance à l'art contemporain? Pourquoi abandonner avec une véritable violence subjective la production d'objets sociaux entre sculpture et design utopique dont ton chemin d'artiste est borné? Qu'est-ce qu'il te prend? Ou plutôt qui te prend? Qui te prend pour pouvoir dire: je? Où se loge la force de proposer de descendre et comment parvenir à « toucher au plus bas »2? Sara? Sara qui écrit et qui parle? Margarete? Sulamith? Margarete et Sulamith, dont les noms dansent sur le désastre?


Mais à partir de ces questions qui ne se posent qu'en silence, tous les mots brûlent. Georges Bataille dirait qu'ils « excèdent », qu'ils sont « intenables ». Il faut donc y aller, il faut, pour être à peu près à hauteur de l'artiste, accepter la mise en bouche d'un brûlot:


Une origine juive. Née sur le sol de ta Terre promise. Une nationalité israélienne. Départ à contresens. France. Europe. Choix de la nationalité française. Elguidj verso Bartolani. Études. Sculpture. Un goût et une confiance laïques. Avènement de la jeune et brillante artiste. Art contemporain. Voyage. Voyage international. Une commande publique. Ambassade de France dans un émirat. Vous ne pouvez pas être du voyage. Je suis française. Vous ne pouvez pas être du voyage. La sculpture partira vers sa propre diaspora. Elle souffrira d'être installée à contresens comme un contresens. Elle y est toujours. Comme un contresens. Petite anecdote et première vraie mortification d'artiste. L'artiste remise au pas de l'oie de l'histoire.
Se calmer. S'interdire la paranoïa victimaire. Tout confier à une folle énergie de l'époque. Comme un optimisme, comme une croyance. Œuvre à quatre mains, propre aux années fin 1980, 1990. Objet de sculpture, design social, sortie des lieux d'exposition. Relation privilégiée avec le non-public de l'art.
Puis une récente bascule. Reprendre ses deux mains pour travailler à nouveau seule. Ouvrir enfin le livre de la mémoire. S'engouffrer dans la bibliothèque du savoir et du débat sur l'holocauste. Les mots piégés. Le yiddishland, la Lituanie, le monde, les mondes engloutis, l'Europe centrale, de l'Est. Voyage et voyage, vers l'origine ou plus simplement vers le hors-champ de l'histoire. Les camps. Le camp. L'infirmerie. La voix de Sara. Le livre médiumnique qui enflamme l'atelier d'une nouvelle urgence : laisser couler cette humeur.
Je vois ce travail et je reconnais son appartenance à ce que Rosalind Krauss appelle « le destin de l'informe »3, à ce qui a donné lieu au terme d' «art abject» dans l'histoire encore récente d'une marginalité artistique américaine, soit le développement d'oeuvres comme celles de Mike Kelley et de Bruce Nauman, dont la réflexion sur l'objet, la forme, dans le souci de ne rien laisser se construire de plein, de productif, de moral ou de critique, destin de l'informe qui explore le « plus bas que bas », la déviance, l'inachevé.
Car, en effet, le pire danger qui s'ouvre devant les gestes que Judith Bartolani vient de faire, serait de considérer que leur production s' appuie et s'installe sur de l'indignation morale et qu'ils attendent un assomption. Le travail de Judith Bartolani aujourd'hui ouvre d'abord pour elle-même la boîte de Pandore qui contient tout autant qu'elle peut les tenir, les forces qui font et défont les rapports de l'art et de l'histoire. Il est visible que, par une nécessité absolue qui excède le champ psychologique de la recherche des origines, sa qualité d'artiste la conduit à articuler sa nouvelle oeuvre - et dans cette oeuvre qui est encore un reste d'image - vers une qualité de symptôme qui interdise le désir de produire du sens autre que de l'abjection ouverte où se rencontre la plus grande énergie dans la prise de conscience offusquée des ressorts de l'histoire.

Cette « chute », puisqu'il ne s'agit pas d'assomption, rejoint la « dialectique symptomale » dont parle Georges Didi-Huberman dans sillage de Georges Bataille 4. Une manière d'oeuvrer qui ressemble à l'ouverture d'une blessure qui met en scène la vaine intégrité des corps et désigne l'intenable et extatique certitude du rapport à la mort, incarnée par la constatation de la présence permanente du bourreau dans les « machines pénitentiaires» de l'histoire.

L'expression artistique valse sur un parquet d'abord constitué des forces immenses produites par le déroulement de l'histoire. Dès que les savoirs constitués ont pu mémoriser - c'est-à-dire écrire ou conserver - à la fois les faits et les gestes, les récits et les objets du passé, la certitude d'une connivence cachée, l'existence d'un sens qui lierait les uns aux autres sont apparus comme des certitudes. Mais la certitude de l'existence des liens n'a valeur ni de sens ni de preuve et n'entraîne en rien une quelconque transparence. La seule certitude a très vite été celle du constat de l'opacité dans laquelle se cherchent en aveugle l'art et l'histoire.
Dans cette nuit, dans ce brouillard, une « histoire de l'art » est née. Histoire des faits et gestes produits dans la périphérie de l'histoire, elle élucide comme elle peut tout ce qui est à portée de la raison, pour s'installer dans le territoire de la causalité puis tracer les lignes droites, signaler les bifurcations, dessiner les rotondes qui fluidifient la circulation et la cohérence du sens. Il semble que le territoire de l'histoire de l'art soit traversé par une utopie urbanistique. Ce désir cohérence est bien entendu légitime - légitimé par la construction structurante de la notion de « modernité » - comme d'autre part peut-être considéré comme légitime le travail de refoulement de tout ce qui a trait à ce que Denis Hollier, parlant de Georges Bataille, désigne dans " la valeur d'usage de l'impossible" 5.
Ouvrir le chapitre de « l'impossible» revient à participer à une entreprise spirituelle que peu d'hommes ont fréquentée consciemment, mais que l'histoire - dans le cours de ses événements et particulièment de ses atrocités - nourrit avec une stupéfiante indifférence. Considérant les arts, la philosophie et la réflexion sur l'histoire, nous sommes souvent en face d'un faisceau d'activités humaines qui semble vouloir conjuguer les conditions d'élucidation, pour une perception cohérente du monde. En revanche, devant l'immense violence de l'histoire ou devant le chaos des douleurs que s'infligent les hommes, la question serait de savoir ce qui travaille du côté de l'impossible et de l'informe.


Au sortir d'un des pires moments de l'histoire, l'extermination programmée de ta diaspora juive en Europe, la pensée, l'expression artistique, ont émis quelques signes de déroute: comment créer, comment écrire, comment penser après Auschwitz? Et que faire du constat que la pensée de « la solution finale » a pu germer au sein d'une des cultures européennes les plus raffinées? Que faire en effet de ce hiatus où apparaissait l'insigne et spectaculaire faiblesse de l'idée même de culture? Que faire d'une pensée esthétique quand elle tend vers la définition de la notion d'élite et entraîne des réflexes autoritaires? Pire encore, que faire de l'immense soupçon que l'on pouvait alors porter sur l'optimisme de la culture, quasiment soldé comme un argument politique par les idéologies les plus suspectes?
Quand, en 1945, la guerre s'achève sur des traités de paix et des déclarations d'intentions, ces textes produisent une rhétorique dont la naïveté nous déconcerte. Stupéfaits nous découvrons que dans l'énoncé humaniste qui a l'ambition de cautériser les malédictions du siècle, tout travaille à les évacuer par incantation, par défaut, sans jamais sentir le devoir de les enregistrer pleinement comme des faits avérés, réalités objectives et sombres parfaitement suffisantes pour laisser apparaître « un défaut d'absolu »6 radical. Cataracte cognitive devant « la transparence du mal »7 comme premier opérateur des destinées humaines.


Aux antipodes de ce type de textes - et sans parler des représentations produites par les artistes pour les accompagner-, l'art a été travaillé par l'exploration d'un champ très particulier et prémonitoire depuis les années 1930, d'abord dans les textes que Georges Bataille, Michel Leiris et leurs comparses ont produits dans la revue Documents entre 1929 et 1930, puis par une série d'artistes révélés dans cette dimension par Documents, suivie par une cohorte de créateurs qui ne cessent, jusqu'à nos jours, de rejoindre la phrase célèbre de Bataille: « Par contre affirmer que l'univers ne ressemble à rien et n'est qu'informe revient à dire que l'univers est quelque chose comme une araignée ou un crachat. » Du côté du domptage de l'araignée, nous penserions en souriant de dégoût (et ce pour retrouver la diction « bataillenne »?) à Louise Bourgeois; du côté du crachat, nous irions vers Jackson Pollock ou Kasuo Shiraga (Gutaï). Mais ces artistes « post-nucléaires » pourraient très bien s'articuler avec le Miró peintre des années 1930 ou avec les représentations de torture dont le « sacrifice par arrachement du coeur » sorti de la bibliothèque vaticane et reproduit en 1930 dans le numéro 4 de Documents.


Judith Bartolani vient de se placer dans cette cohorte. Deux sculptures en attestent. Il est évident que ni l'une ni l'autre ne veulent être ravalées au rang indigne de l'objet, fût-ce même à la tentative de dignité dont se parerait l'objet d'art. Horizontalité d'abord. La première sculpture inscrit son propos secret dans l'horizontalité de la page du livre (ce sont les propos qui s'envolent et se dispersent), la seconde dans celle d'un lit où l'on gît; l'une et l'autre fondent et se fondent dans une dimension qui, pour engager la matière, manifeste avec conviction le refus béat de l'érection. Les prénoms « Margarete » et « Sulamith » s'incarnent dans une frise échevelée, une morve dansante, une ronde macabre qui irrigue d'un soupçon saisissant toutes les rondes, toutes les danses. Jamais plus, sans doute, la danse de Matisse ne sera regardée comme la mise en scène du pas primesautier de l'innocence bachique. La ronde scelle la figure de l'horizontalité.
N'est-ce pas dans Malaise dans la civilisation, quand Freud s'interroge sur les nouvelles secousses de l'histoire et notamment la logique du discours et de l'action du fascisme, que la notion de verticalité comme sublimation apparaît? Fondement de la nature « visuelle » de l'art, de l'exclusion du corps et de ses fonctions animales, assurant l'autonomie et la cohérence, la verticalité modélise la création sur le mode de la conquête du sublime. Par antithèse, l'horizontalité appartient à un ordre où les pulsions régressives deviennent productives. La très célèbre série de photographies de Jacques-André Boiffard, publiée par Documents dès 1929, développe le sujet Gros Orteil, image sortant étrangement de la nuit argentique, et pointant ce point dérisoire, cet organe de l'équilibre dont l'ablation contrarierait la verticalité. Le sublime est donc dans l'orteil et peut-être même dans la raclure qui s'accumule sous l'ongle d'un pied mal soigné. Le miroir vertical de la ressemblance n'a, pour ces artistes, véritablement rien à dire.

Fonte, transparence et opacité ensuite. Judith Bartotani vient de cesser de désigner ce que l'objet de sculpture devrait être. En cela, elle prolonge une distinction chère à la pensée qui souhaite rejoindre la notion de « bas matérialisme ». Pourchassée par Bataille, la confiance dans les idéaux de la matière, dans laquelle se réfugient nombre d'artistes ou d'amateurs d'art, vaut sublimation. Une ultime tentative ontologique de donner de la verticalité à ce qui est d'évidence «L'écrasement d'un ver de terre ». Les Dirt Paintings de Rauschenberg disent cela, les Étendues, les Tourtes de Gasiorowski les prolongent, la Messe de terre de Dubuffet comme bon nombre d'oeuvres travaillent à enliser la vanité de l'objet d'art vers plus de contradictions et de vérités humaines. Pourtant, en art, toujours flotte cette prétention à la maîtrise quand il est si patent que la destinée humaine conjugue des notions « intenables ». Les oeuvres de Judith Bartotani indiquent cela. Avoir entendu la souffrance de la victime, y compris te rire dont il (elle) se pare, cette Pratique de la joie devant la mort, ne se sublime pas.
Cela est pris dans la fonte et la perte, dans la mort de la transparence, qualité provisoire des matières plastiques, dans l'opacité des résines métamorphosées par le feu. Il s'agit d'une humeur, d'une humeur de matière qui s'écoule sans avoir ta prétention de prendre forme. Ni de dire. Ni de prouver.
L'artiste est en bonne compagnie dans te train des régressions structurantes où chacun s'efforce de ne plus avoir de complicité avec la catégorie infamante de l'objet d'art, propre à nourrir la pathologie du collectionneur. Trou de souris dans lequel Boltanski se glisse en affirmant: «Il est inutile d'honorer tes morts. Il faut les distraire, leur organiser des petites fêtes. »

Crachat enfin. En art les glaires abondent. Leur indécision dans l'ordre de la matériologie a été mise en scène par Duchamp, Man Ray, Gordon Matta-Clark, Lygia Clark, Arman entre autres, et, pour être vraiment exercée dans leur écoulement, par Edward Ruscha, Robert Smithson, César parfois et tous ceux pris par la nécessité d'éloigner un temps de leur oeuvre l'autorité de la forme. Que Picasso par exemple, dans les années 1930, soit tenté par des compositions dignes des « élevages de poussière» que Duchamp et Man Ray avaient fait entrer dans le champ des préoccupations artistiques, est un signe supplémentaire de la nécessité qu'éprouvent les artistes d'exercer la frontière de la formalisation et sa résistance. De même, quand Rauschenberg oscille entre la réflexion sur les connivences de l'art et de la technologie et le vertige régressif des Dirt Paintings, il accomplit le même voyage. Celui dont Michel Leiris décrit l'objet et la méthode. Derrière le crachat, l'informe.


Parcours que vient d'accomplir Judith Bartolani et qui n'est pas sans rappeler ce que Michel Leiris appelle dans sa définition de la «débâcle »: « Si le fleuve dégelait, c'en serait fait de ce trafic qui nous attache, de cette grotesque circulation de minimes calculs qui nous courbe sous le joug et fait de nous pire que des domestiques. Pour sortir de ce débarras plein de poussière dans lequel nous moisissons, nous et nos défroques dédorées [...] il faudrait que les eaux de nos coeurs, de nos muscles, de notre peau reprennent notre état naturel [...]. » S'en suit l'intenable, l'impossible. Je le disais, ici tous les mots brûlent...


Il n'y a donc pas de conclusion.

Michel Enrici, in Judith Bartolani - Nos funérailles, livre d'artiste, édition Analogues, 2005

1 "Dictionnaire", in Documents n°4, Paris, 1930
2 Geoges Didi-Huberman, "Une dialectique "symptomale"", in La ressemblance informe ou le gai savoir visuelle chez Georges Bataille, Paris, Macula, 1995
3 Rosalind Krauss, "Le destin de l'informe", in L'informe mode d'emploi, Paris, Centre Georges Pompidou, 1996
4 Geoges Didi-Huberman, "Une dialectique "symptomale"", in La ressemblance informe ou le gai savoir visuelle chez Georges Bataille, Paris, Macula, 1995
5 Denis Hollier, "La valeur d'usage de l'impossible", préféce à la réimpression de Documents, Paris, Jean-Michel Place, 1991
6 Georges Bataille, "L'expérience intérieure", in Œuvres complètes, Paris Gallimard, 1978
7 Georges Bataille, "Informe", in Documents n°7, 1929

At last and again, the formless : a book and two sculptures by Judith Bartolani
Michel Enrici

“ …anger makes them gnash their teeth, terror and suffering make the mouth the organ of heartrending screams.” -1-


There are a few abrupt questions we might put to Judith Bartolani: Why this agitation? Why this muted anger rumbling through your work? Why this tension in your studio? Why this book which speaks with Sara, beyond the tomb? Why make those vivid images of suffering and torture appear in the gemmail of the digital image? Why these words eddying through space? Why this formless representation of a stalag with the colour and substance of spit? Why break with the consensual belonging to contemporary art? Why abandon with real subjective violence the production of those social objects, mixtures of sculpture and utopian design, that mark your artistic path? What has come over you? Or rather, who has overcome you? Who has come into you to speak as an “I”? Where lies the power to propose this descent, and what do you do to “touch the bottom”? -2- Sara? Sara who writes and who talks? Margarete? Shulamith? Margarete and Shulamith whose names dance on the disaster?
But after all these questions that are asked only in silence, all words burn. Georges Bataille would say that they “exceed”, that they are “unbearable”. And so we must go there; we must, to be nearly on a level with the artist, let those scorching words into our mouths. Jewish origins. Born on the soil of the Promised Land. Israeli nationality. Why leave? France. Europe. The choice of French nationality. El Guedj verso Bartolani. Studies. Sculpture. Secular taste, secular confidence. The advent of the brilliant young artist. Contemporary art.
Travel. International travel. A public commission. The French embassy in an emirate. You cannot go there. I am French. You cannot go there. The sculpture will go towards its own diaspora. It will suffer its contradictory installation as a contradiction. It is still there. Like a contradiction.
A minor anecdote, the artist’s first mortification. The artist sent back to the snakes and ladders of history. Calm down. Avoid victim paranoia. Entrust it all to the wild energy of the age. Like optimism. Like a belief. Work for four hands, typical of the late 1980s and the 1990s. A sculpture object, a social design, outside the exhibition space. A privileged relation to the non-public of art.
Then, a recent switch. Back to two hands and working alone. At last, open the book of memory. Throw yourself into the library of knowledge and debates over the Holocaust. Treacherous words. Yiddish-land, Lithuania, the world, buried worlds, Central Eastern Europe. Travel and travel, towards the origin or, more simply, outside the frame of history. The camps. The camp. The infirmary. Sara’s voice. The mediumistic book that fires the studio with something newly urgent. Give this mood its head. I see this work and I recognise its kinship with what Rosalind Krauss calls “the destiny of the formless” -3-, with what gave rise to the term “abject art” in the still recent history of American artistic marginality, or the development of work like that of Mike Kelley and Bruce Nauman with their reflection on the object, on form, their concern to allow the construction of nothing full, productive, moral or critical; the destiny of the formless which explores “lower than lower”, deviancy, incompleteness.

For the worst danger in reacting to the actions that Judith Bartolani has just made, would be to consider that their production draws on and bases itself on moral indignation, and that they await an assumption. Judith Bartolani’s work today opens, for itself first of all, the Pandora’s box which contains, as far as it is able to hold them, the forces that make and unmake the relations between art and history. It is visible that by an absolute necessity that exceeds the psychological field of the search for origins, as an artist, she is led to articulate her new work – and, within this work, what is still a reminder of image – towards a symptomatic quality that prohibits desire from producing any meaning other than the overt abjection where we encounter the greatest energy in the indignant realisation of the workings of history.
This “fall” – for it is no assumption – comes close to the “symptomal dialectics” evoked by Georges Didi-Huberman in the wake of Georges Bataille.-3- A way of working which resembles the opening of a wound that stages the vain integrity of bodies and points up the unbearable and ecstatic certainty of the relation to death embodied by the observation of the permanent presence of the executioner in the “penitentiary machines” of history.
Artistic expression waltzes on a parquet floor constituted primarily by the huge forces unleashed by the unfolding of history. As soon as constituted knowledge was able to memorise – that is to say, to write or conserve – both the facts and the actions, the stories and the objects of the past, the certainty of a hidden connection, the existence of a meaning linking them to each other, was seen as assured. But the certitude of the existence of links cannot have any value as meaning or evidence and does not lead to any kind of transparency. Very soon, the only certainty was that of the opacity in which art and history blindly grope for each other.
In this night, in this fog, a “history of art” emerged. A history of the events and actions produced on the periphery of history, it elucidates as best it can everything within reach of reason, moving into the territory of causality and then tracing straight lines, signalling bifurcations, drawing the roundabouts that keep the movement and the coherence of meaning fluid. It would seem that the territory of art history is informed by an urban utopia. This desire for coherence is of course legitimate – legitimised by the structuring construction of the notion of “modernity – just as one can also consider as legitimate the work of repressing everything that has to do with what Denis Hollier, speaking of Georges Bataille, designates as “the use value of the impossible”.-4-
To open the chapter of “the impossible” is to participate in a spiritual undertaking that few men have frequented consciously but that history– in the course of its events, and particularly of its atrocities – feeds with staggering indifference. Considering the arts, philosophy and thought on history, we are often faced with a bundle of human activities that seem to be about to link the conditions of elucidation for a coherent perception of the world. Whereas, faced with the immense violence of history, or faced with the chaos of suffering that men inflict on themselves, what we really need to know is what is at work on the side of the impossible and the formless.
After one of the worst moments in history, the programmed extermination of the Jewish diaspora in Europe, thought and artistic expression manifested signs of confusion: how were creating, writing and even thinking possible after Auschwitz? And what of the fact that the idea of the “Final Solution” germinated in one of the most refined European cultures? What was to be done about this hiatus that revealed the extreme and spectacular weakness of the very idea of culture? What was to be done with aesthetic thought when it tends towards the definition of a notion of the elite and leads to authoritarian reflexes? Worse, what to do about the great suspicion that could now be brought to bear on the optimistic vision of culture used almost as a political selling point by the most dubious ideologies?
When, in 1945, the war came to an end with peace treaties and declarations of intent, these texts produced a rhetoric whose naivety we find disconcerting. We are stunned to discover that everything about the humanist position and its ambition to cauterise the century’s wounds tends only to evacuate them by means of incantation, by default, without ever feeling the duty to fully record them as known facts, objective, sombre realities that are quite sufficient to reveal a radical “failure of the absolute” -5-. A cognitive cataract before the “transparency of evil” -6- as the prime mover of human destinies.
At the opposite extreme to such texts – and without mentioning the representations produced by artists in order to accompany them – art has, since the 1930s, been shaped by the exploration of a very singular and premonitory field, first articulated in the texts written by Georges Bataille, Michel Leiris and their fellow writers for the journal Documents between 1929 and 1930, then by a series of artists working in this dimension, as revealed by the same journal. Over subsequent decades and through to the present, many more artists have adopted the logic of Bataille’s famous words:
“However, to say that the universe looks like nothing and is just formless is like saying the universe is something like a spider or like spit.” -7- As for taming the spider, our thoughts may, with a smile of disgust (and in echo of Bataille’s vocabulary?), go to Louise Bourgeois; regarding the spit, we would think of Jackson Pollock or Kasuo Shiraga (Gutai). But these “post-nuclear” artists could also be very clearly articulated with Miró’s paintings of the 1930s or with the representations of the “sacrifice by tearing out the heart” taken from the Vatican library and reproduced in issue number 4 of Documents in 1930. Judith Bartolani has just joined this cohort. Two sculptures bear witness to this fact. It is clear that neither can be reduced to the unworthy status of object, not even an object that has the dignity purportedly conferred on the artwork. To begin with, the horizontality. The first sculpture lays down its secret message within the horizontality ofthe page (a message that flies and scatters), the second within a bed.
Both are founded on and merged with a dimension that, in order to engage with matter, manifests with conviction its blissful refusal of erectness. The first names “Margarete” and “Shulamith” are embodied in a wild frieze, a dancing streak of snot, a macabre round that suffuses all rounds, all dances with compelling suspicion. Never again, surely, will Matisse’s dance be seen as the image of the impulsive steps of Bacchic innocence. The round seals the figure of horizontality.
Is it not in Civilisation and Its Discontents, when Freud analyses the upheavals of history, and notably the logic of the discourse and action of fascism, that the notion of verticality as a form of sublimation first appears? As the foundation of the “visual” nature of art, of the exclusion of the body and its animal functions, ensuring autonomy and coherence, verticality models creation as a conquest of the sublime.
Antithetically, horizontality belongs to an order in which regressive drives become productive. The famous series of photographs by Jacques-André Boiffard, published by Documents in 1929, develops the theme of Bataille’s “Big Toe”, in an image that emerges strangely from the gelatine-silver night, designating that derisory point, that organ of balance whose ablation would counter verticality. The sublime therefore resides in the toe, and perhaps, even, in the scrapings that gather under the nail of an unkempt foot. For these artists, the vertical mirror of resemblance is truly mute.
Melting. Transparency and then opacity. Judith Bartolani has just stopped designating what the sculpture object should be. In this sense she is extending a distinction favoured by the mode of thought that seeks kinship with “base materialism”. Hunted down by Bataille, the confidence in the ideals of matter in which many artists and art lovers take refuge is a form of sublimation. One last ontological attempt to confer verticality on what is evidently “the crushing of a worm”. That is what Rauschenberg’s Dirt-Paintings say, and in this they are extended by Gasiorowski’s Etendues and Tourtes. Dubuffet’s Messe de Terre, like many other works, seeks to ground the vanity of the art object in more contradictions and human truths. And yet, in art, there is always a leaning towards the pretension of mastery, however manifest it may be that human destiny combines “unsustainable” notions. Judith Bartolani’s works indicate this. Having heard the victim’s suffering, including the laughter with which he (she) bedecks it, this “practice of joy in the face of death” cannot be sublimated. It is taken from within melting and loss, from the death of transparency, the provisional quality of plastic materials, from the opacity of resins metamorphosed by fire. It is a mood, a humour of material that flows without claiming to take shape. Or to say. Or to prove.
The artist is in fine company in this sequence of structuring regressions in which each person strives to cease colluding with the ignominious category of the art object liable to feed the pathology of the collector. Into this mouse hole slips Boltanski by saying that, “It is useless to honour the dead. One must entertain them, put on little parties for them.”And finally, spit. Art abounds in phlegm. Its materiological uncertainty has been exhibited by Duchamp, Man Ray, Gordon Matta-Clark, Lygia Clark and Arman, among others, and truly exercised in its flow by Edward Ruscha, Robert Smithson and César (sometimes), and by all those who have for a time been moved by the need to withdraw their work from the authority of form. That Picasso should, in the 1930s, have been tempted by compositions worthy of the “dust raising” that Duchamp and Man Ray had brought into the field of artistic concerns is another sign of the necessity felt by artists to test the frontier of formalisation and resistance thereto. And when Rauschenberg oscillates between reflection on the kinship between art and technology and the regressive dizziness of the Dirt Paintings, he goes on the same journey. The journey whose goal and method is described by Michel Leiris. Behind the gob of spit, the formless.
This is the path taken by Judith Bartolani, which also recalls what Michel Leiris calls forth in his definition of the “debacle”. “If the river thawed, that would be the end of this traffic that links us, of this grotesque circulation of minimal calculations that keeps us bent under the yoke and makes us worse than servants. To get out of this dusty box room where we are mouldering, us and our cast-offs with their worn gold... the waters of our hearts, our muscles and our skin would need to return to our natural state”. What follows is the unbearable, the impossible. As I was saying, here, all words burn.
There is therefore no conclusion.


1. “Dictionary” in Documents no. 4, Paris, 1930.
2. Georges Didi-Huberman, “Une dialectique ‘symptômale’”, La Ressemblance informe ou le Gai Savoir visuel chez Georges Bataille, Paris, Macula, 1995.
3. Rosalind Krauss, “Le destin de l’informe”, L’informe, mode d’emploi, Paris, Centre Georges Pomidou, 1996.
4. Denis Hollier, “La valeur d’usage de l’impossible », preface to a new edition of Documents.
5. Georges Bataille, “L’expérience intérieure”, OEuvres complètes.
6. Georges Bataille, “Informe”, Documents, 1929.
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