David ANCELIN 

Flipper 2008
Métal peint, polycarbonate, guirlande électrique (100m), 300 x 600 x 500 cm (avec socle)
Vue de l'exposition personnelle à la Monnaie de Paris


L’œuvre Flipper, 2008 présentée par David Ancelin à l’Hôtel de la Monnaie est une structure gigantesque de flipper, bancale, parcourue d’une guirlande lumineuse. Une carcasse haute de près de 5 mètres de haut, reprise de sa précédente pièce Flipper, 2006. L’agrandissement d’objets du quotidien est un phénomène récurrent de l’art contemporain actuel et agit, après celui de Claes Oldenburg, au mieux comme une vulgaire copie, au pire comme une tare. Seulement voilà, Ancelin n’agrandit pas notre quotidien. Il adapte son propre travail au lieu dans lequel il l’expose. Il se réinvente, s’interroge, se défie lui-même. Une démonstration d’intelligence artistique qui se pose comme un hommage à l’idée originelle du changement de taille, dans cette simple évocation de flipper. Ce rapport d’échelle implique une double modification : structurelle tout d’abord, puisque la pièce bascule dans le champ du squelette architectural avec l’utilisation de matériaux de construction issus du bâtiment. Humaine ensuite, de part son rapport au spectateur, devenu pour un temps inadapté, dépassé, inquiet ou émerveillé. Car il y a évidemment une relation au merveilleux qui parcourt ce flipper. Une sorte de fin de fête triste, une poésie nostalgique.

Flipper, 2008 agit comme un signe, un révélateur de l’approche conceptuelle d’Ancelin. Elle invite le très respectable Hôtel de la Monnaie dans une danse étrange. Une relation s’installe dans l’espace entre l’œuvre et le lieu comme entre l’homme et la machine. Un balancement entre deux degrés de passé, deux forces, deux approches du monde contemporain, deux monumentalités. Cette fusion d’entités doubles se retrouve dans le traitement même de la pièce qui marie le minimalisme devenu joueur des Incomplete Open Cubes de Sol Lewitt à la mélancolie esthétique de Claude Lévêque. Plus structure que sculpture, l’œuvre suggère irrémédiablement un passé empreint d’insouciance, de jeunesse et de rock’n’roll. Un sentimentalisme qui transparaît surtout dans la guirlande d’ampoules issue des bals populaires, allusion aux anciens frontons de flippers, traversant la structure comme le déploiement du parcours de la balle d’acier. Une carcasse archivée, conservée ici, mais toujours vivante et lumineuse. Un passé instable, fragile, remémoré par une œuvre qui, malgré sa massivité, est titubante.

Benjamin Bianciotto

 
Vue d'exposition à la Galerie de l'espace Diderot, Association Tripode, Nantes, 2006
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